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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
i la Sagesse divine est envoyée par le Père de qui elle émane. C'est ce que reconnaît Salomon dans la prière suivante qu'il adressait au Seigneur. Epris d'amour pour cette Sagesse, et désireux de la posséder, il s'écriait « Envoyez-là du ciel, votre sanctuaire, et du trône de votre grandeur, afin qu'elle soit avec moi, et qu'elle agisse avec moi (Sg 9, 10 )». C'est-à-dire afin qu'elle m'enseigne à travailler utilement, car sans elle les travaux de l'homme sont stériles et infructueux, tandis qu'avec elle ils deviennent féconds en vertus et en bonnes oeuvres. Toutefois l'envoi ou la mission de la Sagesse divine est bien différente selon qu'elle est envoyée à l'homme ou qu'elle-même se fait homme. C'est elle en effet qui « se répand dans les âmes saintes, qui fait les amis de Dieu et les prophètes (Sg 7, 27 )», qui remplit les esprits célestes, et qui les emploie de la manière la plus convenable à l'exécution de ses volontés. Mais quand la plénitude des temps fut arrivée, cette même Sagesse descendit sur la terre, non pour remplir les anges, ni devenir elle-même un ange, si ce n'est en ce sens que le Verbe nous a révélé les conseils éternels du Père, qui sont aussi ses propres conseils. Ce n'était pas non plus pour converser avec les hommes, ni s'épancher en eux, comme déjà , elle l'avait fait à l'égard des patriarches et des prophètes; mais c'était pour prendre la nature humaine, en sorte que le Verbe divin devînt Fils de l'homme. Tel est ce mystère de l'Incarnation dont la révélation, avant même qu'elle se réalisât dans le sein virginal de Marie, a été le principe du salut pour les saints et les justes qui ont vécu sous l'Ancien Testament, et qui sont nés de la femme. Et aujourd'hui encore ce même mystère accompli et publié dans l'univers entier, est la sanctification de tous ceux qui en font l'objet de leur foi, de leur espérance et de leur amour. Il est en effet « ce grand sacrement d'amour qui s'est montré dans la chair, qui a été autorisé par l'Esprit, manifesté aux anges, prêché aux nations, cru dans le monde et élevé dans la gloire (1Tm 3, 16 )».
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Le Verbe de Dieu est donc envoyé par Celui dont il est le Verbe ; et le Fils est envoyé par le Père qui l'a engendré; ainsi encore le Père qui engendre, envoie, et le Fils qui est engendré, est envoyé. Bien plus, ce même Verbe est envoyé à tout homme qui le connaît et qui le comprend, du moins, autant que notre esprit peut le connaître et le comprendre en raison de ses progrès et de son avancement dans les voies spirituelles. Il ne serait pas exact de dire que le Fils est envoyé, en tant qu'il est engendré du Père, mais en tant qu'il a paru dans le monde revêtu de la nature humaine. C'est en ce sens qu'il a dit lui-même : « Je suis sorti de mon Père, et je suis venu dans le monde (Jn 16, 28 ) ». On peut aussi affirmer que le Verbe multiplie dans le temps sa mission céleste, toutes les fois que notre esprit le perçoit, selon cette parole de Salomon : « Envoyez, Seigneur, votre Sagesse, ci afin qu'elle soit avec moi et qu'elle travaille avec moi ».
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Car le Verbe qui est engendré de toute éternité, est lui-même éternel, puisqu'il est « la splendeur de la lumière éternelle ».
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Nous disons au contraire qu'il est envoyé dans le temps, parce qu'il s'est fait connaître aux hommes; aussi cette mission du Fils de Dieu ne s'est-elle véritablement réalisée que le jour où, dans la plénitude des temps, il naquit de la femme et se montra en la, nature humaine. « En effet, le monde avec sa propre sagesse n'ayant pu connaître la sagesse de (420) Dieu, parce que la lumière luit dans les ténèbres, et que les ténèbres ne la reçoivent pas, il a plu à Dieu de sauver par la folie de la prédication ceux qui croiraient en lui ». C'est pourquoi « le Verbe s'est fait chair et a habité parmi nous ( 1100o 1, 21 ; Jn 1, 5, 14 ) ». Cependant lorsque ce même Verbe est perçu dans le temps par notre intelligence, on peut bien dire tout ensemble qu'il est envoyé, et qu'il n'est pas envoyé dans le monde, car il ne se montre point à nous sous une forme sensible; c'est-à-dire qu'il n'est point aperçu des yeux du corps. C'est ainsi que nous-mêmes ne sommes plus en quelque sorte dans le monde, quand notre intelligence s'abîme, autant qu'elle le peut, dans les profondeurs de l'éternité. C'est encore dans le même sens que les justes ici-bas, quoique vivant en la chair, ne sont plus du monde, parce que leur esprit est tout absorbé dans les choses divines. Cependant, nous ne disons point que le Père soit envoyé, quoique dans le temps il se révèle aux hommes. La raison est qu'il est à lui-même son propre principe, et qu'il ne procède d'aucune autre personne divine. Tout au contraire la Sagesse, ou le Verbe dit: « Je suis sorti de la bouche du Très-Haut »; et il est dit de l'Esprit-Saint « qu'il procède du Père (Eccli. 24, 5 ; Jn 15, 26 ) ». Mais le Père ne procède d'aucune de ces deux personnes.
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Ainsi le Père engendre et le Fils est engendré; et de même le Père envoie et le Fils est envoyé. Mais ici celui qui engendre et celui qui est engendré, celui qui envoie et celui qui est envoyé ne sont qu'un, parce que le Père et le Fils ne sont qu'un (Jn 10, 30 ). Ainsi encore le Saint-Esprit est un avec le Père et le Fils, parce que les trois personnes divines ne sont qu'un seul et même Dieu. Nous disons également que le Fils est né du Père, parce qu'il a été engendré du Père, et qu'il a été envoyé par le Père, parce qu'il nous a fait connaître le Père ; de même le propre de l'Esprit-Saint est qu'il procède du Père, et il est dit envoyé par le Père, lorsqu'il nous fait connaître celui dont il procède. Toutefois il serait inexact d'affirmer que l'Esprit-Saint ne procède point du Fils, puisqu'il est appelé dans l'Ecriture l'Esprit du Fils, non moins que l'Esprit du Père. C'est d'ailleurs ce que Jésus-Christ lui-même voulut nous faire entendre, quand il souffla sur ses apôtres, leur disant: « Recevez le Saint-Esprit (Jn 20, 22 ) ». Car ce souffle matériel et sensible qui des lèvres du Sauveur se répandit sur le visage des apôtres, n'était point la personne même du Saint-Esprit; et nous ne devons y voir qu'un signe exprimant que cet Esprit divin procède également du Fils, comme du Père.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Et en effet, qui serait assez insensé pour avancer que l'Esprit-Saint, qu'ici Jésus-Christ donne en soufflant sur ses apôtres, n'est pas le même que celui qu'il leur envoya après son ascension? Car il n'y a qu'un seul Esprit de Dieu, qui est l'Esprit du Père et du Fils; et c'est cet Esprit divin qui opère toutes choses en tous (1100o 12, 6 ). Quant au mystère de ces deux missions, j'en dirai plus tard quelque chose, selon que Dieu me l'inspirera: mais pour le moment, il suffit d'observer que Jésus-Christ, en disant: « L'Esprit que je vous enverrai de la part du Père ( Jn 15, 26 ) », veut prouver à ses apôtres que cet Esprit procède du Fils non moins que du Père. Précédemment il leur avait dit que « le Père l'enverrait au nom du Fils ( Jn 14, 26 ) ». Mais il n'avait point dit que ce serait de la part du Fils, comme il avait dit qu'il l'enverrait, lui, « de la part du Père ». Ainsi faisait-il entendre que le Père est dans les deux autres personnes divines le principe de la divinité, ou, si l'on aime mieux, de la déité.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Ainsi l'Esprit-Saint, qui procède du Père et du Fils, a pour principe le Père par qui le Fils est engendré : et quant à cette parole de l'Evangéliste : « Le Saint-Esprit n'était pas encore donné, parce que Jésus n'était pas encore glorifié ( Jn 7, 39 ) », elle signifie seulement que cette mission, ou envoi de l'Esprit-Saint, qui s'opérerait après la glorification du Christ, serait plus éclatante que celles qui déjà avaient eu lieu. Et en effet, l'Esprit-Saint avant cette solennelle effusion, était souvent communiqué aux hommes, mais non de la même manière. Car, dites-moi au nom de qui les prophètes ont-ils parlé, s'ils n'ont point reçu ce divin Esprit? Aussi, l'Ecriture dit souvent et expressément qu'ils ont parlé par l'inspiration du Saint-Esprit. Elle l'assure spécialement de Jean-Baptiste, dont elle dit « qu'il sera rempli du Saint-Esprit dès le sein de sa mère »; et parce que Zacharie, son père, fut également rempli du même Esprit, il prophétisa l'avenir du saint précurseur. C'est encore par (421) l'inspiration du Saint-Esprit, que Marie glorifia le Dieu qu'elle portait en son sein, et que le vieillard Siméon et Amine la prophétesse reconnurent le divin Enfant et en publièrent les grandeurs (50c 1, 15-38; 2, 25, 41-79 ).
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Comment donc l'évangéliste a-t-il pu dire que « l'Esprit-Saint n'était pas encore donné, parce que Jésus n'était pas encore glorifié », si ce n'est dans le sens qu'il devait, au jour de la Pentecôte, se répandre et se donner avec une effusion et une solennité inconnues jusqu'alors? Et en effet, l'Ecriture ne dit nulle part qu'avant ce jour, l'Esprit-Saint ait communiqué le don des langues. Mais il le fit à l'égard des apôtres, afin de leur donner un signe sensible de sa venue; il voulut aussi montrer par là que tous les peuples, quoique divisés de langage et de nationalité, devaient tous croire en Jésus-Christ par la grâce de l'Esprit-Saint. Au reste, c'est cette unité en la foi qu'avait annoncée le psalmiste, quand il s'écriait : « Il n'est point de langues ni d'idiomes dans lesquels on n'entende la voix du Seigneur. Son éclat s'est répandu dans tout l'univers, et elle a retenti jusqu'aux extrémités de la terre ( Ps 18, 4, 5 ) ».
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
CHAPITRE XXI.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
REVÉLATIONS SENSIBLES DU SAINT-ESPRIT. RÉSUMÉ.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Il y a donc eu dans le Verbe comme mélange et fusion de la nature divine et de la nature humaine pour former une seule personne: et ce mystère s'est accompli lorsque dans la plénitude des temps le Fils de Dieu fut envoyé, afin que naissant de la femme, il devînt pour le salut des hommes fils de l'homme. Sans doute l'ange a bien pu avant l'incarnation annoncer et représenter ce divin Sauveur, mais il ne lui a jamais été permis de se substituer à sa personne. Et maintenant que dire de la colombe et des langues de feu qui signalèrent la présence de l'Esprit-Saint? Ce n'étaient que des symboles puisqu'il existe entre le Père, le Fils et l'Esprit-Saint une entière égalité de nature, et une même éternité. La créature se montra alors docile et obéissante pour représenter par ses mouvements et ses formes cet Esprit divin et immuable, mais elle ne lui fut point unie, comme dans l'incarnation la nature humaine l'a été au Verbe fait chair. Je n'ose donc affirmer qu'avant le baptême de Jésus-Christ et le jour de la Pentecôte de semblables apparitions n'aient pu avoir lieu. Mais e dis en toute assurance que le Père, le Fils et l'Esprit-Saint n'ont qu'une seule et même nature, qu'il n'y a qu'un seul Dieu créateur, et que les oeuvres de la toute-puissance divine appartiennent inséparablement aux trois personnes de la Sainte Trinité. Toutefois ce mystère ne saurait être invinciblement démontré par aucun des signes ou figures que nous empruntons aux créatures sensibles et matérielles, tant celles-ci s'éloignent de Dieu et lui sont inférieures.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Cette même impuissance se fait encore remarquer dans notre langage. Car la parole, qui fait entendre un son matériel ne peut nommer que séparément le Père, le Fils et le Saint-Esprit; et elle est ainsi forcée de mettre comme quelque inégalité entre les trois personnes divines, puisqu'elle n'en prononce le nom que successivement, et à des intervalles plus ou moins rapprochés. Cependant, parce que le Père, le Fils et l'Esprit-Saint n'ont qu'une seule et même nature, ils ne sont qu'un seul Dieu, et ne peuvent avoir avec les créatures aucun rapport de mobilité, ni d'espace ni de durée. Les trois personnes divines existent de toute éternité, et elles existeront éternellement, car en Dieu l'éternité ne saurait se concevoir sans la vérité et sans l'amour. Lorsqu'au contraire je nomme le Père, le Fils et le Saint-Esprit, je les nomme séparément, et quand j'écris ces trois noms, je suis contraint de les écrire séparément. Au reste la même difficulté se présente au sujet des facultés de notre âme. Et en effet, si je nomme la mémoire, l'intelligence et la volonté, je rapporte chacun de ces noms à une faculté spéciale de mon âme, quoiqu'en réalité cette âme soit une et indivisible. Sans doute dans le langage, on distingue la mémoire, l'intelligence et la volonté; mais dans l'opération, ou action extérieure, on reconnaît que tout est commun à ces trois facultés. Ainsi en est-il de la sainte Trinité. Elle a parlé tout entière par le Père, s'est incarnée par le Fils, et s'est montrée dans le Saint-Esprit sous la forme d'une colombe. Toutefois nous ne laissons pas que de rapporter individuellement à chaque personne ces différentes actions. Cette explication :peut en quelque sorte nous faire comprendre comment les trois personnes de la sainte Trinité, quoique réellement inséparables, peuvent (422) néanmoins agir séparément par l'intermédiaire des créatures visibles, et comment encore la même action, qui au dehors se rapporte spécialement au Père, au Fils, ou au Saint-Esprit, est cependant l'action commune et indivisible de la Trinité entière.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Si vous me demandez maintenant quel fut avant l'incarnation l'agent qui mettait en mouvement les paroles, les figures et les symboles qui annonçaient ce mystère, je vous dirai que Dieu y employait le ministère des anges, comme je pense l'avoir suffisamment prouvé par divers passages des saintes Ecritures. Mais comment s'est accomplie l'Incarnation? Je réponds à cette seconde question en affirmant que le Verbe de Dieu s'est fait chair, c'est-à-dire qu'il s'est fait homme. Toutefois la nature divine n'a point été changée, ni transformée en la nature humaine; mais l'une et l'autre subsistent en une seule personne, qui est tout ensemble Fils de Dieu et fils de l'homme. Comme tous les hommes, le Verbe incarné a réellement un corps, et il possède une âme raisonnable; et nous le nommons Dieu en raison de sa nature divine, et homme en raison de sa nature humaine. Vous est-il difficile de comprendre ce mystère? purifiez votre esprit par la foi, par la fuite du péché et par le soin des bonnes oeuvres; joignez-y encore la prière et les saints désirs de la piété, et bientôt, soutenu parle secours divin de la grâce, vous arriverez à l'amoureuse intelligence -de ces hautes vérités.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Mais après l'Incarnation, comment la voix du Père s'est-elle fait entendre, et comment l'Esprit-Saint s'est-il montré sous une forme corporelle? Tout d'abord j'affirme que ce prodige s'est opéré à l'aide d'une créature. Cependant je n'ose assurer ni que cette créature fut seulement un corps matériel, ni qu'elle n'était point mise en mouvement par cet agent spirituel que les Grecs nomment esprit, et qui sans être une âme, serait doué d'intelligence et de raison. Mais même en ce sens, il n'y aurait point eu unité de personne, comme dans le Verbe né d'une Vierge. Car qui oserait dire que la créature, quelle qu'elle fût, qui reproduisait la voix du Père, fût Dieu le Père, et que la colombe ou les langues de feu qui symbolisèrent la présence de l'Esprit-Saint, fussent cet Esprit lui-même? En toute hypothèse, il ne s'agit ici que d'une figure et d'un signe que Dieu dirigeait selon son bon plaisir. Au reste, il me paraît également difficile d'assigner à ce miracle une meilleure explication, et téméraire d'affirmer qu'on ne peut lui en trouver une autre. Toutefois je m'abstiens en ce moment de prouver mon sentiment, et je le ferai plus tard, autant que Dieu m'en donnera la force; car je dois auparavant discuter et réfuter les diverses objections que les hérétiques tirent non pas de nos livres saints, mais du raisonnement humain, et par lesquelles ils accommodent à leurs erreurs les témoignages des Ecritures qui établissent la divinité du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
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La Trinité 04 incarnation du verbe/Saint Augustin
Quant à l'égalité des trois personnes, je crois avoir suffisamment prouvé que pour avoir été envoyé par le Père, le. Fils n'est point inférieur au Père, et que l'Esprit-Saint n'est inférieur ni au Père, ni au Fils, quoiqu'il soit envoyé par le Père et par le Fils. Ce terme de mission ou d'envoi doit s'entendre du corps humain qu'a pris le Verbe, et de la créature sous laquelle l'Esprit-Saint s'est montré: ou plutôt il nous rappelle que le Père est le principe des deux autres personnes, et il ne désigne dans la Trinité aucune inégalité de nature, ni aucune différence de perfection. Et en effet, supposons que Dieu le Père ait voulu se faire voir sous une forme corporelle, il n'en sera pas moins absurde de dire qu'il a été envoyé par le Fils qu'il a engendré, ou par l'Esprit-Saint qui procède de lui. Je termine donc ici ce quatrième livre, et dans les suivants, avec la grâce de Dieu, je me propose d'exposer et de réfuter les subtils arguments de mes adversaires. (423)
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
LIVRE CINQUIÈME : RÉFUTATION DES ARIENS.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
Réfutation des Ariens. Rapportant à la substance de Dieu tout ce que l'Ecriture affirme de la relation des personnes, ils en concluaient que le Fils étant engendré par le Père, lui était par cela seul inférieur. Saint Augustin leur répond que les relations diverses qui existent entre les personnes divines, n'altèrent aucunement en elles la substance, ou nature, et qu'il règne entre elles une égalité parfaite. Il prouve sa thèse par l'explication de divers passages de l'Ecriture, et aussi par quelques comparaisons ou similitudes qu'il emprunte aux créatures, et il termine en avouant combien est grande l'impuissance du langage humain quand il s'agit d'expliquer le mystère de la Sainte Trinité.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
LIVRE CINQUIÈME : RÉfutation des ariens.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
CHAPITRE PREMIER.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
DIEU EST IMMUABLE ET INCORPOREL.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
J'aborde un sujet où le langage chez tout homme, et principalement chez moi, ne saurait rendre exactement la pensée. Bien plus, cette pensée elle-même, quand elle se fixe sur le mystère de la Sainte Trinité, sent tout d'abord combien elle est au-dessous de Dieu, et combien encore elle est impuissante à le comprendre tel qu'il est. Et en effet nul homme, fût-il l'égal du grand Apôtre, ne peut voir Dieu que « comme dans un miroir, et sous des formes obscures (I Cor; XIII, 12 ). Cependant nous devons toujours diriger nos pensées vers ce Dieu qui est notre Seigneur et maître , quoique nous ne puissions jamais avoir de pensées dignes de lui, et nous devons en tous les temps le bénir et le louer, quoique nous ne puissions jamais ni le louer, ni le bénir dignement. C'est pourquoi j'implore ici son secours pour bien saisir moi-même mon sujet, et pour en donner à nies lecteurs une facile explication. Je les prie aussi de me pardonner les fautes qui viendraient à m'échapper; car si d'un côté la pureté de mes intentions peut me rassurer, de l'autre le sentiment de ma propre faiblesse me remplit de crainte. Que mes lecteurs me soient donc indulgents, s'ils remarquent que mes paroles ne répondent pas toujours à ma bonne volonté, soit parce qu'ils comprendront mieux que moi les choses divines, soit parce que je n'aurai pas su me bien exprimer. Quant à moi, je leur pardonne de grand coeur si la difficulté provenait en eux d'ignorance, ou de la faiblesse d'esprit.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
Au reste, un moyen facile de pratiquer cette mutuelle et réciproque bienveillance, est de s'attacher fortement à ce principe que tout ce que l'on peut dire du Dieu immuable et invisible, existant par lui-même et se suffisant à lui-même, ne saurait s'apprécier par aucune comparaison avec les créatures visibles et changeantes, mortelles et indigentes. Ne nous en étonnons point, puisque dans l'étude des phénomènes du corps et des sens, et dans l'explication de ceux de la conscience, la science de l'homme se fatigue beaucoup et avance peu. Cependant les recherches auxquelles se livre la piété chrétienne touchant les choses divines et surnaturelles, ne sauraient être vaines et inutiles, si elle évite de s'appuyer orgueilleusement sur ses propres forces, et si elle se laisse diriger et conduire par la grâce du Dieu qui est tout ensemble le créateur et le sauveur de l'homme. Et en effet, comment pourrions-nous comprendre Dieu, nous qui ne nous comprenons pas nous-mêmes? Toutefois nous avons à cet égard une connaissance suffisante pour savoir que notre âme est par l'intelligence bien au-dessus de toutes les créatures. Mais pouvons-nous saisir dans cette âme quelques linéaments de formes, quelques émanations d'odeur, quelque étendue d'espace, quelque division de parties, quelque fraction de quantité, et enfin quelque distance de lieu ou de locomotion ? Certainement nous ne trouvons rien de semblable dans cette âme intelligente qui est le chef-d'oeuvre de la création , et qui selon notre capacité, nous fait comprendre les secrets de la sagesse divine. Or, ce qui ne se rencontre point dans la plus noble partie de l'homme, devons-nous le chercher en Dieu, qui est infiniment meilleur que tout ce qui est en nous bon et excellent ? C'est pourquoi concevons Dieu, autant que nous le pourrons, comme étant bon sans aucun attribut de bonté, grand sans aucun degré de grandeur, créateur sans aucun besoin des êtres, immense sans aucune dépendance des lieux ni de l'espace, renfermant l'univers en lui-même sans aucun circuit ni enceinte, présent partout sans aucune délimitation de présence, (424) éternel sans aucun assujettissement au temps ni à la durée, auteur du mouvement et du changement des créatures sans aucune interruption de sa propre immutabilité, enfin impassible et supérieur à tout accident. Penser ainsi de Dieu, ce n'est pas, il est vrai, en comprendre parfaitement la nature , mais c'est pieusement éviter à cet égard tout langage erroné.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
CHAPITRE II.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
DE L'ESSENCE DIVINE.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
Cependant on ne saurait douter que Dieu ne soit une substance, ou essence, ce que les Grecs nomment hypostase. Et en effet, de même que le mot sagesse dérive du verbe sapere, discerner, et le mot science du verbe savoir, l'essence suppose un être qui existe par lui-même. Or, quel est l'être qui réalise le mieux cette condition, si ce n'est celui qui disait à Moïse son serviteur : « Je suis celui qui suis »; et encore : « Celui qui est m'envoie, vers vous (Ex; III, 14 ) »? Mais en dehors de Dieu, toute essence, ou toute substance est soumise à divers accidents qui l'assujettissent à une plus ou moins grande mutabilité. Dieu au contraire ne saurait éprouver rien de semblable. Et c'est pourquoi il est seul l'être souverainement immuable. Aussi, par cela seul qu'il ne tient l'être d'aucun autre que de lui-même, le nom d'essence lui convient parfaitement. Car on ne peut dire que l'être qui est sujet au changement, soit toujours le même, puisque, lors même qu'il n'en éprouverait aucun, la seule possibilité d'y être soumis fait qu'il cesse d'être souverainement immuable. Mais s'agit-il de Dieu, j'affirme que loin d'éprouver aucun changement, il ne peut en aucune manière y être assujetti. Aussi son immutabilité est-elle une vérité incontestable.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
CHAPITRE III.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
CONSUBSTANTIALITÉ DU PÈRE ET DU FILS.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
J'aborde maintenant l'objection que nos adversaires tirent de l'impuissance où nous sommes de toujours exprimer parfaitement notre pensée, et de toujours connaître parfaitement la vérité. Ainsi un des sophismes les plus subtiles que les Ariens opposent à la doctrine catholique, est de dire que tout ce qui se peut énoncer, ou penser de Dieu, se rapporte non aux accidents, mais à la substance même. Or, le Père est non-engendré selon sa substance, et le Fils est engendré selon la sienne, car n'être pas engendré, et être engendré sont deux choses toutes différentes. Donc le Père et le Fils ne peuvent être consubstantiels. Je reprends cet argument, et je dis : Tout ce qui s'affirme de Dieu, s'affirme de la substance : donc cette parole: « Le Père et moi sommes un », doit s'entendre de la substance ( Jn 10, 30 ). Donc encore le Père et le Fils sont consubstantiels. Voulez-vous au contraire ne pas rapporter cette parole à la substance? j'y consens, mais avouez qu'on peut énoncer quelque chose de Dieu sans le rapporter formellement à la substance. Et alors qui nous force d'entendre de la substance les mots engendré et non engendré? L'Apôtre affirme également du Fils de Dieu, qu'il « n'a pas cru que ce fût pour lui une usurpation de s'égaler à Dieu (Ph 2, 6. ) ». Or, en quoi est-il égal à Dieu? Si ce n'est pas selon la substance, il faut admettre, et qu'on peut parler de Dieu sous d'autres rapports que ceux de la substance, et que rien n'oblige à entendre de la substance les mots engendré et non-engendré. Vous y refusez-vous, parce que tout ce qui est énoncé de Dieu se rapporte forcément à la substance? je suis alors en droit d'affirmer que le Père et le Fils sont consubstantiels.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
CHAPITRE IV.
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La Trinité 05 réfutation des ariens/Saint Augustin
TOUT ACCIDENT SUPPOSE DANS LE SUJET QUELQUE CHANGEMENT.
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