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La Trinité 01 consubstantialité des personnes divines/Saint Augustin
examinons si par ces mots : « Je n'ai point parlé de moi-même », J.-C. ne voudrait pas dire : je ne me suis pas donné l'être à moi-même. Et en effet quand le Verbe de Dieu s'énonce au dehors, il ne peut que s'énoncer lui-même, puisqu'il est le Verbe de Dieu. Aussi dit-il souvent que « son Père lui a donné », pour nous faire entendre qu'il tire de lui sa génération éternelle. Car le Fils n'existait point avant que le Père lui donnât, et le Père ne lui a pas donné parce qu'il manquait de quelque chose, mais il lui a adonné d'être, et en l'engendrant il lui a donné d'avoir toutes choses. Il ne faut pas en effet raisonner ici du Fils de Dieu, comme nous le faisons des créatures. Avant le mystère de l'Incarnation, et avant qu'il eût pris la nature humaine, le Fils unique de Dieu, par qui tout a été fait, réunissait en lui l'être divin et la plénitude divine, Il était, et parce qu'il était, il avait. C'est ce qu'exprime clairement ce passage de saint Jean, si nous savons le comprendre: « Comme le Père, dit Jésus-Christ, a la vie en soi, ainsi a-t-il donné au Fils d'avoir en soi la vie (Jn 5, 26 ) ». Mais le Fils n'existait point avant qu'il eût reçu du Père d'avoir la vie en soi, puisque par cela seul qu'il est, il est la vie. Ainsi cette parole «Le Père adonné au Fils d'avoir la vie en soi», signifie que le Père a engendré un Fils qui est la vie immuable et éternelle. Et en effet le Verbe de Dieu n'est pas autre que le Fils de Dieu, et le Fils de Dieu est lui-même « le Dieu véritable et la vie éternelle », ainsi que nous le dit saint Jean dans sa première épître ( Jn 5, 20 ). Pourquoi donc ne pas reconnaître ici ce même Verbe, dans « cette parole que Jésus-Christ a «annoncée, et qui jugera le pécheur au dernier «jour?» Au reste tantôt il se nomme lui-même la parole du Père, et tantôt le commandement du Père, en ayant soin de nous avertir que ce commandement est la vie éternelle. « Et je sais, dit-il, que son commandement est la vie éternelle ( Jn 12, 50 ) ».
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Il nous faut maintenant chercher en quel sens Jésus-Christ a dit : « Je ne le jugerai point, mais la parole que j'ai annoncée « le jugera». D'après le contexte de ce passage, c'est comme si le Sauveur disait : je ne le jugerai point, mais ce sera le Verbe du Père qui le jugera. Or le Verbe du Père n'est autre que le Fils de Dieu, et par conséquent nous devons comprendre que Jésus-Christ dit en même temps : je ne jugerai point et je jugerai. Mais comment cela peut-il être vrai, si ce n'est dans ce sens : je ne jugerai point parla puissance de l'homme, et en tant que je suis Fils de l'homme, mais je jugerai par la puissance du Verbe, et en tant que je suis Fils de Dieu? Si au contraire vous ne voyez que répugnance et contradiction dans ces paroles : je jugerai, et je ne jugerai pas ; je vous demanderai de m'expliquer celles-ci: « Ma doctrine n'est pas ma doctrine ( Jn 16 ). Comment Jésus-Christ peut-il dire que sa doctrine n'est pas sa doctrine? car observez qu'il ne dit point : cette doctrine n'est pas une doctrine, mais : « Ma doctrine n'est pas ma doctrine ». Il affirme donc tout ensemble que sa doctrine est sienne, et qu'elle n'est pas sienne. Or, cette proposition ne peut être vraie que si on en prend le premier membre dans un sens, et le second dans un autre sens. Comme Dieu la doctrine de Jésus-Christ est sienne, et comme homme elle n'est pas sienne ; et c'est ainsi qu'en disant : « Ma doctrine n'est pas ma doctrine, mais elle est la doctrine de Celui qui m'a envoyé », il fait remonter nos pensées jusqu'au Verbe lui. même.
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La Trinité 01 consubstantialité des personnes divines/Saint Augustin
Je cite encore un autre passage qui tout d'abord ne paraît pas moins difficile. « Celui, dit Jésus-Christ, qui croit en moi, ne croit pas en moi ( Jn 12, 44 ) » . Comment croire en lui est-il ne pas (362) croire en lui ? Et comment comprendre cette proposition en apparence si contradictoire : « Celui qui croit en moi, ne croit pas en moi, mais en Celui qui m'a envoyé? » En voici le sens: Celui qui croit en moi, ne croit point en ce qu'il voit, autrement son espérance s'appuierait sur la créature; mais il croit en Celui qui a pris la formé humaine afin de se rendre sensible aux yeux de l'homme. Et en effet le Fils de Dieu ne s'est fait homme que pour purifier le coeur de l'homme, et l'amener par la foi à le considérer comme égal à son Père. C'est pourquoi il élève jusqu'à son Père la pensée de ceux qui croient en lui, et en disant qu' «on ne croit pas en lui, mais en Celui qui l'a envoyé», il prouve qu'il ne se sépare point du Père qui l'a envoyé, et il nous avertit de croire en lui, comme nous croyons au Père auquel il est égal. C'est ce qu'il dit ouvertement dans cet autre passage : « Croyez en Dieu, et croyez aussi en moi ( Jn 14, 1 ) » ; c'est-à-dire, croyez en moi de la même manière que vous croyez en Dieu, parce que le Père et moi ne sommes qu'un seul et même Dieu. Ainsi lorsque Jésus-Christ dit que « celui qui croit en lui, ne croit pas en lui, mais en Celui qui l'a envoyé », et dont il ne se sépare point, il transporte notre foi de sa personne à celle de son Père. Et de même quand il dit: « Il n'est pas en mon pouvoir de vous donner cette place et elle est réservée à ceux à qui mon Père l'a préparée », il s'exprime clairement selon le double sens que l'on attache à ses paroles. Cette observation s'applique également à cette autre parole:
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« Je ne jugerai point ». Et en effet comment serait-elle vraie , puisque, selon l'Apôtre Jésus-Christ doit juger les vivants et les morts ( 2Tm 4, 1)? Mais parce qu'il n'exercera point ce jugement comme homme, il en rapporte l'honneur et le pouvoir à la divinité, et il élève ainsi nos pensées jusqu'à ces mystères sublimes qui sont le but de son incarnation.
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CHAPITRE XII.
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DANS QUEL SENS LE PÈRE NE DOIT-IL PAS JUGER.
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Si Jésus-Christ n'était tout ensemble Fils de l'homme parce qu'il a pris la forme d'esclave, et Fils de Dieu parce qu'il n'a point dépouillé la nature divine , saint Paul n'eût point dit des princes de ce inonde que « s'ils l'avaient connu, ils n'auraient jamais crucifié le Seigneur de la gloire ( 1100o 2, 8 ) ». C'est en effet comme homme que Jésus-Christ a été crucifié, et néanmoins les juifs ont crucifié le Seigneur de la gloire. Car le mystère de l'Incarnation consiste en ce que Jésus-Christ est tout ensemble Dieu-Homme, et Homme-Dieu. Mais comment, et en quoi est-il Dieu, et est-il homme? Un lecteur prudent, pieux et attentif comprendra aisément avec la grâce de Dieu. Pour moi, j'ai déjà dit que comme Dieu il glorifie ses élus, parce que comme Dieu il est le Seigneur de la gloire. Toutefois il est vrai de dire que les juifs ont crucifié le Seigneur de la gloire, puisqu'on peut dire que Dieu même a été crucifié non en la vertu de la divinité , mais en l'infirmité de la chair ( 2100o 13, 4 ). C'est aussi à Jésus-Christ comme Dieu qu'appartient le jugement, parce qu'il juge par l'autorité de sa divinité, et non par la puissance de son humanité. Néanmoins il doit comme homme juger tous les hommes, de même qu'en lui le Seigneur de la gloire a été crucifié. D'ailleurs il nous l'affirme ouvertement par ces paroles : « Quand le Fils de l'homme, dit-il, viendra dans sa majesté, et tous les anges avec lui, toutes les nations seront assemblées devant lui ( Mt 25, 31, 32 ) ». La suite du chapitre qui traite du jugement dernier confirme pleinement cette vérité.
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Juifs qui auront persévéré en leur malice, recevront en ce jugement la punition de leur crime, et « ils tourneront leurs regards vers Celui qu'ils auront percé ( Za 12, 10 ) ». Et en effet, puisque les bons et les méchants doivent également voir Jésus-Christ comme Juge des vivants et des morts, il est certain que les pécheurs ne le verront qu'en son humanité. Mais alors cette humanité sera glorieuse, et non humiliée comme au jour de sa passion. Au reste, les pécheurs ne verront point en Jésus-Christ la divinité selon laquelle il est égal à son Père. Car ils n'ont pas le coeur pur, et Jésus-Christ a dit: « Bienheureux ceux qui ont le coeur pur, parce qu'ils verront Dieu ( Mt 5, 8 ) ». Or, voir Dieu, c'est « le voir face à face », comme dit l'Apôtre ( 1100o 13, 12 ). Et cette vision qui est la souveraine récompense des élus, n'aura lieu qu'au jour où Jésus-Christ remettra son royaume à Dieu le (363) Père. C'est alors que toute créature étant soumise à Dieu, l'humanité sainte que le Fils de Dieu a prise en se faisant homme, lui sera elle-même soumise. Et en effet, comme homme « le Fils sera lui-même assujetti à celui qui lui aura assujetti toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous ( 1 cor; 15, 28 ) ». Mais si le Fils de Dieu se montrait comme juge dans la forme divine qui le rend égal à son Père, et s'il se montrait ainsi aux pécheurs, il n'aurait plus de raison de promettre à son fidèle et bien-aimé disciple, comme bienfait inestimable, « qu'il l'aimera, et qu'il se montrera à lui ( Jn 14, 21 ) ». Concluons qu'au dernier jour le Fils de l'homme jugera tous les hommes en vertu de l'autorité qui lui appartient comme Dieu, et non par la puissance de son humanité. Et toutefois, il est vrai de dire que le Fils de Dieu jugera aussi tous les hommes : seulement il n'apparaîtra point en la nature divine qui le rend égal au Père, mais en la nature humaine qu'il a prise en devenant le Fils de l'homme.
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Il est donc permis de dire et que le Fils de l'homme jugera, et que le Fils de l'homme ne jugera pas. Il jugera, puisqu'il a dit lui-même : « Lorsque le Fils de l'homme viendra, toutes les nations seront assemblées devant lui ( Mt 25,32 ) » ; et il ne jugera pas, afin que cette parole soit accomplie: « Je ne jugerai point»; et cette autre: « Je ne cherche point ma gloire; il est quelqu'un qui la cherche et qui juge ( Jn 12, 47, 8, 50 )». Bien plus, parce qu'au jour du jugement général, Jésus-Christ apparaîtra comme homme et non comme Dieu, il est vrai d'affirmer que le Père ne jugera pas; et c'est en ce sens que Jésus-Christ a dit: «le Père ne juge personne, mais il a donné tout jugement au Fils ( Jn 5, 22 )».
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Quant à cette autre parole que j'ai déjà citée : « Le Père a donné au Fils d'avoir la vie en soi ( Jn 5, 26)», elle se rapporte à la divinité de Jésus-Christ et à sa génération éternelle. On ne pourrait donc l'entendre de son humanité dont l'Apôtre a dit « que Dieu l'a élevée, et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom ». Car évidemment l'Apôtre désigne ici Jésus-Christ comme Fils de l'homme, puisque c'est seulement en cette qualité que le Fils de Dieu est ressuscité d'entre les morts. Egal comme Dieu à son Père, il a daigné s'abaisser jusqu'à prendre la forme d'esclave, et c'est en cette ferme qu'il agit, qu'il souffre et qu'il reçoit la gloire. Pour s'en convaincre, il suffit de lire ce passage de l'épître aux Philippiens: « Le Christ s'est humilié, se rendant obéissant jusqu'à la mort, et la mort de la croix. C'est pourquoi Dieu l'a élevé et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom; afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans le ciel, sur la terre et dans les enfers, et que toute langue confesse que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de son Père ( Ph 2, 6, 11 ) ». Ce témoignage de l'Apôtre se rapporte à Jésus-Christ comme homme, de même que cette parole : « Le Père a donné tout jugement au Fils »; et l'on voit assez qu'on ne saurait l'interpréter dans le même sens que celle-ci : « Le Père a donné au Fils d'avoir la vie en soi » : autrement il serait inexact de dire « que le Père ne juge personne». Car en tant que le Père engendre un Fils qui lui est égal, il juge conjointement avec lui. Il faut donc affirmer qu'au jour du jugement général Jésus-Christ apparaîtra en son humanité, et non en sa divinité. Ce n'est point que celui qui a donné tout jugement au Fils, ne doive aussi juger avec lui, puisque le Sauveur a dit «Il en est un qui cherche ma gloire et qui juge »; mais quand il a ajouté « que le Père ne juge personne, et qu'il a donné tout jugement au Fils », c'est comme s'il eût dit que dans ce jugement personne ne verra le Père, et que tous verront le Fils. En effet, parce que celui-ci est devenu Fils de l'homme, les pécheurs le verront, et ils tourneront leurs regards vers celui qu'ils auront percé.
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Mais peut-être m'accuserez-vous d'émettre ici une pure conjecture plutôt qu'une proposition vraie et évidente. Eh bien ! je vais m'appuyer sur le témoignage certain et évident de Jésus-Christ lui-même. Pour vous convaincre qu'en disant « que le Père ne juge personne, et qu'il a donné tout jugement au Fils », il a voulu expressément marquer que comme juge il apparaîtra en la forme de Fils de l'homme, forme qui n'appartient pas au Père, mais au Fils; forme en laquelle il n'est pas égal, mais inférieur au Père, mais qui lui permettra d'être vu des bons et des méchants, il suffit de lire le passage suivant : « En vérité je vous le dis, celui qui écoute ma (364) parole, et croit à celui qui m'a envoyé, a la vie éternelle et ne sera point condamné, mais il passera de la mort à la vie ». Or, cette vie éternelle dont parle ici Jésus-Christ ne peut être que la vision béatifique dont les pécheurs sont exclus. « En vérité, en vérité, continue-t-il, je vous dis que l'heure vient, et elle est déjà venue, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui l'auront entendue, vivront ( Jn 5, 24, 25 ) ». Mais il n'appartient qu'aux justes d'entendre cette voix, c'est-à-dire de comprendre que par le mystère de l'incarnation le Fils de Dieu, ayant pris la forme d'esclave, est devenu ainsi inférieur à son Père, et néanmoins de croire fermement que comme Dieu, il est égal au Père. Au reste, c'est ce que Jésus-Christ lui-même nous propose de croire, quand il ajoute : «Comme le Père a la vie en soi, ainsi il a donné au Fils d'avoir en soi la vie». Puis il annonce qu'au jour du jugement général, il se manifestera aux bons et aux méchants dans tout l'éclat de sa gloire. Car « le Père, dit-il, a donné au Fils le pouvoir de juger, parce qu'il est le Fils de l'homme ( Jn 5, 26, 27 ) ».
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Il me semble que cette démonstration est évidente. Car Jésus-Christ étant comme Fils de Dieu égal à son Père, n'a point reçu en cette qualité le pouvoir de juger, puisqu'il le possède intrinsèquement avec le Père. Mais il l'a reçu comme homme, et c'est en qualité de Fils de l'homme qu'il l'exercera, et qu'il sera vu des bons et des méchants. Et en effet, les méchants pourront bien voir la sainte humanité de Jésus-Christ, mais la vue de sa divinité sera le privilège des bons qui auront le coeur pur. Et voilà pourquoi le Sauveur leur promet qu'il récompensera leur amour en se manifestant à eux. Aussi ajoute-t-il : « Ne vous en étonnez pas ». Ah! sans doute, nous ne devons nous étonner que de voir des gens qui ne veulent pas comprendre les paroles de Jésus-Christ lorsqu'il dit que son Père lui a donné le pouvoir de juger parce qu'il est Fils de l'homme. Selon eux, il eût dû dire, parce qu'il est le Fils de Dieu. Mais Jésus-Christ étant comme Dieu égal à son Père, ne saurait être vu des méchants en sa divinité, et toutefois il faut que les bons et les méchants comparaissent devant lui, et qu'ils le reconnaissent pour Juge des vivants et des morts. C'est pourquoi il dit: « Ne vous étonnez point; l'heure vient où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui auront bien fait en sortiront pour la résurrection à la vie; mais ceux qui auront mal fait, pour la résurrection du jugement ( Jn 5, 28, 29 ) ». Ainsi, il devient nécessaire que Jésus-Christ reçoive comme Fils de l'homme, le pouvoir de juger, afin que tous les hommes puissent le voir en cette forme qui le rend visible à tous, mais aux uns pour la damnation, et aux autres pour la vie éternelle. Qu'est-ce que la vie éternelle, si ce n'est cette vision béatifique dont les pécheurs sont exclus? « Qu'ils vous connaissent, dit le Sauveur, vous le seul Dieu véritable, et Jésus-Christ que vous avez envoyé (Jn 17, 3 )». Mais cette connaissance de Jésus-Christ ne saurait être que celle de sa divinité, en laquelle il se manifestera aux bons, et non la connaissance de son humanité, en laquelle il sera vu même des méchants.
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Selon que Jésus-Christ apparaîtra comme Dieu à ceux qui ont le coeur pur, il est bon, car le Psalmiste s'écrie : « Que le Seigneur est « bon à Israël, à ceux qui ont le coeur pur ( Ps 70, 1 )! »Mais selon que les méchants le verront comme juge,. ils ne sauraient le trouver bon, parce que toutes les tribu-s de la terre, loin de se réjoui-r en leurs coeurs, se frapperont la poitrine en le voyant ( Ap 1, 7). C'est aussi en ce sens que Jésus-Christ, étant appelé bon par un jeune homme qui l'interrogeait sur les moyens d'acquérir la vie éternelle, lui répond-il : « Pourquoi m'appelez-vous bon? Dieu seul est bon ( Mt 19, 17 ) ». Sans doute, Jésus-Christ dans un autre endroit reconnaît que l'homme lui-même est bon, car « l'homme bon, dit-il, tire de bonnes choses du bon trésor de son coeur, et du mauvais trésor de son coeur l'homme mauvais tire de mauvaises choses ( Mt 12, 35 ) ». Mais le jeune homme dont j'ai parlé précédemment, cherchait la vie éternelle. Or, 1a vie éternelle est cette vision intuitive que Dieu n'accorde point aux méchants, et qu'il réserve pour être la joie des bons. De plus, il n'avait pas une idée nette et précise de celui auquel il s'adressait, et il ne voyait en lui que le Fils de l'homme. Aussi Jésus-Christ lui dit-il : « Pourquoi m'appelez-vous bon?» C'est comme s'il lui eût dit : Pourquoi appelez-vous bon l'homme que vous voyez en moi, et pourquoi (365) me qualifiez-vous de bon maître? En tant qu'homme, et tel que vous me voyez, je me manifesterai aux bons et aux méchants dans le jugement général, mais pour les méchants, cette manifestation ne sera qu'un premier supplice. Les bons au contraire seront admis à me voir en cette nature divine, en laquelle je n'ai pas cru que ce fût pour moi une usurpation de m'égaler à Dieu, et que je n'ai point quittée lorsqu'en m'anéantissant moi-même, j'ai pris la forme d'esclave ( Ph 2, 6, 7 ).
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Concluons donc que le Dieu qui ne se manifestera qu'aux justes, et qui les remplira d'une joie que personne ne leur ôtera, est le Dieu unique, Père, Fils et Saint-Esprit. C'est vers cette joie que soupirait le psalmiste quand il s'écriait: « J'ai demandé une grâce au Seigneur, et je la lui demanderai encore, d'habiter dans la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, pour y contempler la maison du Seigneur ( Ps 26, 4 ) ». Ainsi Dieu seul est excellemment l'être bon, parce que sa vue, loin de causer à l'âme quelque peine, ou quelque douleur, lui est un principe de salut et une source de joie véritable. Dans ce sens, et selon sa divinité, Jésus-Christ pouvait réellement dire : Je suis bon. Mais comme le jeune homme qui l'interrogeait, ne considérait en lui que l'humanité, il lui répondit avec non moins de raison Pourquoi m'appelez-vous bon? car si vous êtes du nombre de ceux dont un prophète a dit « qu'ils regarderont vers Celui qu'ils ont percé ( Za 12, 10 ) », la vue de mon humanité ne sera pour vous, comme pour eux, qu'une douleur et un supplice. Cette parole du Sauveur: « Pourquoi m'appelez-vous bon? « Dieu seul est bon » ; et les autres textes que j'ai cités, me semblent prouver que cette vision qui est exclusivement réservée aux élus, et qui fera que l'oeil de l'homme contemplera l'essence divine, n'est pas différente de celle que saint Paul nomme « face à face ( 1100o 13, 12 )», et dont l'apôtre saint Jean a dit « qu'elle nous rendra semblables à Dieu, parce que nous le verrons tel qu'il est ( 1Jn 3, 2 ) ». C'est de cette vision que parlait le psalmiste quand il s'écriait : « J'ai demandé une grâce au Seigneur, de contempler la beauté du Seigneur ( Ps 26, 7 ) ». Et Jésus-Christ lui-même a dit : « Je l'aimerai, et je « me manifesterai à lui ( Jn 14, 21 )». Aussi devons-nous purifier nos coeurs par la foi, car il est dit : « Bienheureux ceux qui ont le coeur pur, parce qu'ils verront Dieu ( Mt 5, 8 ) ». Une lecture assidue de nos Ecritures et surtout le regard de l'amour nous fourniraient encore sur cette vision béatifique mille textes épars çà et là, et non moins concluants; mais j'en ai rapporté assez pour être en droit de conclure que cette vision est le bien suprême de l'homme, et que sa possession doit être le but et le terme de toutes nos bonnes oeuvres.
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Quant à cette autre vision qui sera celle de l'humanité sainte de Jésus-Christ, et qui aura lieu, lorsque toutes les nations seront rassemblées devant lui, et que les pécheurs lui-diront: « Seigneur, quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim ou soif?» il est certain qu'elle ne sera ni un bien pour les méchants condamnés aux flammes éternelles, ni le bien suprême pour les élus. Car le Juge souverain les appellera à prendre possession du royaume qui leur a été préparé dès le commencement du monde. « Allez au feu éternel », dira-t-il aux méchants. Et aux bons: « Venez les bénis de mon Père, possédez le royaume qui vous a « été préparé ,( Mt 25, 37, 41 )». Et alors, continue l'Evangéliste, « les méchants iront au feu éternel, et les bons à la vie éternelle ». Or, la vie éternelle consiste, selon la parole du Sauveur lui-même, en ce « qu'ils vous connaissent, vous le seul Dieu véritable, et Jésus-Christ que vous avez envoyé », mais Jésus-Christ vu en cette gloire, au sujet de laquelle il disait à son Père: « Glorifiez-moi de la gloire que j'ai eue en vous avant que le monde fût ( Jn 17, 3, 5 ) ». Ce sera aussi alors que le Fils remettra le royaume à Dieu, son Père, et que le bon serviteur entrera dans la joie de son Maître. Jésus-Christ cachera donc les élus de Dieu dans le secret de sa face, et il les protégera contre le trouble et l'effroi des hommes, c'est-à-dire des méchants que la sentence du souverain Juge frappera de terreur et de consternation. Mais le juste n'aura rien à craindre parce que caché dans l'intérieur du tabernacle, c'est-à-dire en la foi de l'Eglise catholique, il sera à l'abri de la contradiction des langues, c'est-à-dire des calomnies des hérétiques.
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La Trinité 01 consubstantialité des personnes divines/Saint Augustin
Il est permis d'expliquer autrement ces paroles : « Pourquoi m'appelez-vous bon? et Dieu seul est bon » ; et, on peut le faire en toute sûreté, et de diverses manières, pourvu qu'on ne croie point que le Fils, en tant qu'il (366) est le Verbe par qui tout a été fait, est inférieur au Père en bonté. Ainsi ne vous éloignez point de la doctrine orthodoxe, et plus vous multiplierez les moyens d'échapper aux piéges des hérétiques, plus aussi vous les convaincrez victorieusement de mensonge et d'erreur. Mais poursuivons ce sujet, en le considérant sous un autre aspect. (367)
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
LIVRE DEUXIÈME : MISSIONS ET APPARITIONS.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
Encore de l'égalité et de l'unité de substance dans les trois personnes divines. Celui qui est envoyé n'est point inférieur à celui qui l'envoie. Diverses apparitions de Dieu rapportées dans l'Ecriture. La Sainte Trinité, immuable et invisible de sa nature, est présente en tout lieu. Il y a en elle unité d?action dans la mission et dans l'apparition.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
LIVRE DEUXIÈME : MISSIONS ET APPARITIONS.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
PRÉFACE.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
Ceux qui cherchent Dieu, et qui s'appliquent, selon la faiblesse de l'esprit humain, à comprendre le mystère de la sainte Trinité, entreprennent un travail laborieux et difficile. Car, d'un côté, l'intelligence elle-même s'émousse dans ses efforts pour fixer cette lumière inaccessible, et de l'autre, l'Ecriture renferme une foule d'expressions dont il n'est pas toujours bien facile de saisir le sens. Je crois que l'Esprit-Saint a permis ces difficultés afin d'humilier notre raison, et de la relever ensuite en la forçant de se laisser diriger et éclairer par la grâce de Jésus-Christ. C'est pourquoi, si vous parvenez en un tel sujet à découvrir la vérité pleine et entière, vous devez être facilement indulgent pour ceux qui s'égareraient dans les profondeurs de cet impénétrable mystère. Mais l'homme qui se trompe, doit se prémunir contre deux vices qu'on lui pardonnerait difficilement. Le premier serait de se montrer présomptueux, avant que d'avoir saisi la vérité, et le second serait de s'opiniâtrer à défendre une erreur prouvée et démontrée. Puisse le Seigneur exaucer ma prière, et me préserver de ces deux vices également contraires à la recherche de la vérité, et à la saine interprétation des saintes Ecritures! Puisse-t-il aussi, comme je l'espère, me couvrir du bouclier de sa bonne volonté et de sa miséricorde, afin que je continue avec une ardeur nouvelle à étudier, soit dans l'Ecriture, soit dans la nature visible, la grande question de la nature divine. Au reste, ces deux sources ne nous sont ouvertes que pour nous faciliter la recherche et l'amour de Celui qui a inspiré l'une et créé l'autre.
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Je n'hésiterai pas non plus à dire franchement ma pensée, et toujours je rechercherai l'approbation des gens judicieux, bien plus que je ne craindrai les critiques des méchants. Et en effet, la charité qui est la plus belle des vertus, est si modeste qu'elle emprunte volontiers le doux regard de la colombe, et l'humilité qui est sincère, évite avec soin d'employer la dent du dogue, même lorsqu'elle prouve invinciblement la vérité. D'ailleurs, je préfère les observations de tout censeur catholique aux louanges et aux flatteries d'un hérétique. Car celui qui aime réellement la vérité, ne doit craindre aucune critique. Et en effet, c'est ou un ennemi qui vous reprend, ou un ami. Si c'est un ennemi qui vous insulte, il faut le supporter; si c'est un ami qui s'égare, il faut le ramener en la bonne voie, et s'il veut vous instruire, il faut l'écouter. Mais l'hérétique qui vous loue et qui vous flatte, ne fait que vous affermir dans votre erreur, et vous y enfoncer plus profondément. « Que le juste me reprenne donc, et me corrige avec charité, mais que l'huile du pécheur ne se répande point sur ma tête ( Ps 140, 5 ) ».
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
CHAPITRE I.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
RÈGLES D'INTERPRÉTATION.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
Tout chrétien qui veut parler de Notre-Seigneur Jésus-Christ, doit s'attacher inviolablement à la règle canonique qui est basée sur l'Ecriture et sur l'enseignement des docteurs catholiques. Or cette règle nous apprend à considérer le Fils de Dieu comme égal à son Père, selon la nature divine qu'il possède essentiellement, et inférieur au Père selon la forme d'esclave qu'il a daigné prendre. En cette forme il est inférieur au Père, et à l'Esprit-Saint. Que dis-je? il est inférieur à lui-même, non certes en tant qu'il a été dans le temps, mais en tant qu'il est; car en prenant la forme d'esclave, il n'a point dépouillé la forme de Dieu; et c'est ce que j'ai prouvé dans le livre précédent par plusieurs citations des saintes Ecritures. Cependant il faut reconnaître que nos livres sacrés renferment quelques passages dont le sens peut sembler douteux. Le (368) lecteur hésite donc à les entendre du Fils qui, comme homme, est inférieur au Père, ou du Fils qui, comme Dieu, est égal au Père. C'est qu'en effet nous disons du Fils qu'il est Dieu de Dieu, et lumière de lumière, tandis qu'en parlant du Père, nous disons simplement qu'il est Dieu, et non, Dieu de Dieu. Il est en effet évident que Dieu le Fils a un Père qui l'a engendré, et dont il est le Fils. Le Père au contraire ne doit rien au Fils, si ce n'est que par lui il est le Père. Car tout fils tient de son père tout ce qu'il est, et il ne peut cesser d'être son fils. Mais le père n'est point redevable à son fils de ce qu'il est, puisqu'il est son père.
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La Trinité 02 missions et apparitions/Saint Augustin
Ainsi dans l'Ecriture certains passages marquent qu'entre le Père et le Fils il y a égalité et unité de nature. En voici quelques-uns: « Mon Père et moi sommes un ». Et encore: « Jésus-Christ ayant la nature de Dieu, n'a pas cru que ce fût pour lui une usurpation de s'égaler à Dieu ( Jn 10 , 30 ; Ph 2, 6 ) ». Il serait facile de multiplier des citations semblables. Mais (l'un autre côté plusieurs textes prouvent que le Fils est inférieur au Père en tant qu'il a pris la forme d'esclave, et qu'il a revêtu l'infirmité de la nature humaine. « Le Père », dit Jésus-Christ, « est plus grand que moi » ; et encore : « Le Père ne juge personne, mais il a donné au Fils la puissance de juger». Aussi ajoute-t-il, comme conséquence de cette première parole, « que cette puissance de juger lui a été donnée parce qu'il est Fils de l'homme (Jn 14, 28, 5, 22, 27. ) » Enfin quelques autres passages se taisent sur toute idée d'égalité, ou d'infériorité, et se bornent à exprimer ce que le Fils tient du Père. Tels sont ceux-ci: « Comme le Père a la vie en soi, ainsi il a donné au Fils d'avoir en soi la vie?et le Fils ne peut rien faire par lui-même, qu'il ne le voie faire au Père ( Jn 5, 26, 19 ).
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Si l'on rapportait ce dernier texte à Jésus-Christ comme étant inférieur au Père, en tant qu'il a pris la forme d'esclave, il s'ensuivrait que le Père a marché le premier sur les eaux, qu'il a guéri avec de la salive et de la boue un aveugle-né, et qu'il a opéré tous les miracles que le Fils, comme homme, a faits parmi les hommes (Mt 14, 26, Jn 9, 6, 7). Autrement Jésus-Christ n'eût pu les faire, puisque « le Fils ne peut rien faire par lui-même, qu'il ne le voie faire au Père ». Mais qui porterait jusqu'à ce point le délire et l'extravagance? Le sens de ces paroles est donc d'abord, que la vie est immuable dans le Fils comme dans le Père, et que néanmoins le Fils est engendré du Père; ensuite qu'il y a dans le Père et le Fils unité d'opération, et que néanmoins le Fils tient du Père qui l'a engendré, la puissance d'agir; et en troisième lieu que le Fils voit le Père, mais de telle manière que de cette vue résulte le fait de sa génération. Et en effet, pour le Fils, voir le Père, c'est être du Père ou en être engendré; et le voir agir, c'est agir également, mais non de lui-même, parce qu'il ne s'est pas engendré lui-même, Aussi dit-il que « quelque chose que le Fils voie faire au Père, il le fait aussi », parce qu'il est né du Père ( Jn 5, 19 ).
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Mais ici il ne faut se représenter ni le peintre qui reproduit le tableau qu'il a sous les yeux, ni la main qui fixe par l'écriture les pensées de l'esprit; c'est un ordre d'opération tout différent, car « quelque chose que le Père fasse, le Fils le fait également comme lui ( Ibid.)
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Ces derniers mots, également et comme lui, expriment qu'il y a unité d'opération dans le Père et le Fils, et ils indiquent en même temps que le Fils agit par le Père. C'est pourquoi « le Fils ne peut rien faire par lui-même, qu'il ne le voie faire au Père ». Au reste, en parlant ainsi, les écrivains sacrés n'ont point voulu affirmer que le Fils, comme Dieu, est inférieur au Père, et ils se sont seulement proposé de nous marquer sa génération éternelle. C'est donc faussement que quelques-uns en concluent l'infériorité d u Fils. Cette erreur provient en eux d'une connaissance peu approfondie de nos livres saints, et parce que la saine raison se refuse à interpréter ces divers passages du Fils de Dieu, comme homme, ils se troublent et s'égarent en leurs pensées. Voulons-nous éviter ce malheur? attachons-nous fortement à la règle qui explique ces textes, non de l'infériorité du Fils, mais de sa génération, et voyons-y, non l'indice d'une inégalité quelconque entre le Père et le Fils, mais le mode de la naissance de celui-ci.
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CHAPITRE II.
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