Livre d'Esther
4,13 qui lui fit répondre à son tour : « Ne t’imagine pas que, parce que tu es dans la maison du roi, tu en réchapperas, seule parmi les Juifs. ( ) 4,14 Car si tu persistes à te taire aujourd’hui, c’est d’un autre lieu que viendront pour les Juifs soulagement et délivrance, et toi et la maison de ton père, vous périrez. Qui sait si ce n’est pas en vue d’une circonstance comme celle-ci que tu as accédé à la royauté ? » ( ) 4,15 Esther fit répondre à Mardochée : ( ) 4,16 « Va, rassemble tous les Juifs qui se trouvent à Suse. Jeûnez pour moi, ne mangez pas, ne buvez pas pendant trois jours, nuit et jour. Moi, je jeûnerai aussi avec mes servantes. C’est alors que j’irai chez le roi, en dépit de la loi, et s’il faut périr, je périrai. » ( ) 4,17 Mardochée se retira et fit tout ce qu’Esther lui avait ordonné. Alors, Mardochée pria le Seigneur en rappelant toutes ses œuvres : « Seigneur, Seigneur, Roi souverain de l’univers, tout est soumis à ton pouvoir, personne ne peut s’opposer à toi quand tu veux sauver Israël. C’est toi qui as fait le ciel et la terre et toutes les merveilles qui sont sous le ciel. Tu es le Seigneur de l’univers, et il n’est personne qui puisse te résister, Seigneur. Tu le sais, ô Seigneur, toi qui connais tout : ce n’est pas insolence, orgueil ou vanité, si j’ai refusé de me prosterner devant l’orgueilleux Amane. – Volontiers je lui baiserais les pieds pour le salut d’Israël. Mais j’ai refusé pour ne pas mettre la gloire d’un homme plus haut que la gloire de Dieu : je ne me prosternerai devant personne, sauf devant toi, mon Seigneur, et ce n’est pas là de l’orgueil. Et maintenant, écoute-moi, Seigneur Dieu, ô Roi, Dieu d’Abraham, épargne ton peuple ! Car ils ont projeté de nous perdre, ils veulent détruire ce peuple, ton héritage depuis toujours. Ne méprise pas ta part, elle est à toi : tu nous as rachetés en nous faisant sortir de la terre d’Égypte. Exauce ma prière, sois favorable à ceux qui sont ta part d’héritage ; change notre deuil en joie, afin que nous vivions pour chanter ton nom, Seigneur. Ne laisse pas disparaître ceux dont la bouche te célèbre. » Tous ceux d’Israël criaient de toutes leurs forces, car ils avaient la mort devant les yeux. La reine Esther, dans l’angoisse mortelle qui l’étreignait, cherchait refuge auprès du Seigneur. Elle enleva ses vêtements d’apparat et prit des vêtements de deuil et d’affliction. Au lieu de parfums précieux, elle se couvrit la tête de cendre et de poussière. Elle humilia durement son corps et le recouvrit de ses cheveux en désordre, lui qu’elle se faisait une joie de parer. Elle priait ainsi le Seigneur, Dieu d’Israël : « Mon Seigneur, notre Roi, tu es l’Unique ; viens me secourir, car je suis seule, je n’ai pas d’autre secours que toi, et je vais risquer ma vie. Depuis ma naissance, j’entends dire, dans la tribu de mes pères, que toi, Seigneur, tu as choisi Israël parmi toutes les nations, et que parmi tous leurs ancêtres tu as choisi nos pères, pour en faire à jamais ton héritage ; tu as fait pour eux tout ce que tu avais promis. Et maintenant, nous avons péché contre toi, tu nous as livrés aux mains de nos ennemis, parce que nous avons honoré leurs dieux : tu es juste, Seigneur. Et maintenant, notre dur esclavage ne leur suffit plus. Ils ont fait un pacte avec leurs idoles, pour abolir ce que ta bouche a promis, faire disparaître ton héritage, fermer la bouche de ceux qui te célèbrent, éteindre la gloire de ta maison et les feux de ton autel, pour que s’ouvre la bouche des nations, que soient célébrés les mérites des faux dieux et qu’à jamais soit magnifié un roi de chair. Ne livre pas ton sceptre, Seigneur, à ceux qui n’existent pas. Que nos ennemis ne se moquent pas de notre chute ; retourne contre eux leurs projets. Du premier de nos adversaires, fais un exemple. Souviens-toi, Seigneur ! Fais-toi connaître au jour de notre détresse ; donne-moi du courage, toi, le Roi des dieux, qui domines toute autorité. Mets sur mes lèvres un langage harmonieux quand je serai en présence de ce lion, et change son cœur : qu’il se mette à détester celui qui nous combat, qu’il le détruise avec tous ses partisans. Délivre-nous par ta main, viens me secourir car je suis seule, et je n’ai que toi, Seigneur. Tu connais tout et tu sais que je hais la gloire des impies, que je n’ai que dégoût pour la couche des incirconcis et celle de tout étranger. Tu sais la contrainte où je suis, que j’ai du dégoût pour l’orgueilleux emblème qui est sur ma tête aux jours où je parais en public. Il m’inspire du dégoût comme un linge souillé, et je ne le porte pas les jours où je me repose. Ta servante n’a pas mangé à la table d’Amane, ni honoré les banquets du roi, ni bu le vin des libations. Ta servante n’a pas connu la joie depuis le jour de son élévation, si ce n’est auprès de toi, Seigneur, Dieu d’Abraham. Ô Dieu, qui as pouvoir sur tous, écoute la voix des désespérés, délivre-nous de la main des méchants, et délivre-moi de ma peur ! » ( )

5,1 Au troisième jour, lorsqu’elle eut cessé de prier, Esther quitta ses vêtements de suppliante et revêtit des habits d’apparat. Ainsi dans tout son éclat, ayant invoqué le Dieu qui protège et qui sauve, elle prit avec elle ses deux servantes : sur l’une d’elles, elle s’appuyait mollement ; l’autre l’accompagnait en portant sa traîne. Elle-même était rougissante, au comble de sa beauté ; son visage était radieux, comme épanoui par l’amour, mais son cœur était serré par la peur. Franchissant toutes les portes, elle se trouva devant le roi. Il était assis sur son trône royal, revêtu de l’habit avec lequel il paraissait en public, rutilant d’or et de pierres précieuses : il était redoutable. Il leva son visage rayonnant de gloire et, au comble de la colère, il la fixa. La reine s’effondra. Prise de faiblesse, elle changea de couleur et se pencha vers la tête de la servante qui la précédait. Dieu changea le cœur du roi et l’inclina à la douceur. Saisi d’angoisse, il s’élança de son trône et la prit dans ses bras jusqu’à ce qu’elle se remît. Il la réconfortait par des paroles apaisantes : « Qu’y a-t-il, Esther ? Je suis ton frère. Rassure-toi ! Tu ne mourras pas : notre décret ne vaut que pour le commun des gens. Viens avec moi ! »


19845 Bible des Peuples sur titre chapitre 2023-11-11: Esther se présente devant le roi

19228 Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg sur verset 2023-10-31: ESTHER INTERCÈDE
Après avoir achevé sa prière, Esther se rendit auprès du roi, accompagnée de trois serviteurs, l'un marchant à sa droite, le second de l'autre côté, et le troisième portant sa traîne, lourde des pierres précieuses dont elle était constellée (144). (144) Son principal ornement était le Saint-Esprit qui avait été répandu sur elle. Mais à peine était-elle entrée dans la chambre où se trouvaient les idoles, que l'esprit saint la quitta et qu'elle poussa un grand cri de détresse: «Eli, Eli, lamah azabtani ! Dois-je être châtiée pour des actes que je fais contre mon gré, et seulement pour obéir à des impulsions d'une grande nécessité ? (145) Pourquoi mon sort serait-il différent de celui d'une Mère ? Lorsque Pharaon a seulement tenté d'approcher Sarah, les fléaux se sont abattus sur lui et sur sa maison, mais moi, je suis contrainte depuis des années de vivre avec ce païen, et Tu ne me délivres pas de sa main. Seigneur du monde ! N'ai-je pas respecté scrupuleusement les trois commandements que Tu as prescrits spécialement pour les femmes ?
Pour arriver jusqu'au roi, Esther dut traverser sept appartements, chacun mesurant dix aunes de long. Elle traversa sans encombre les trois premiers, trop éloignés pour que le roi puisse observer sa progression. Mais à peine eut-elle franchi le seuil de la quatrième chambre qu'Assuérus l'aperçut et s'exclama, fou de rage: «O pour les disparus, on ne retrouve pas leur semblable sur la terre ! J'ai prié Vashti de se présenter devant moi, mais elle a refusé, et je l'ai fait tuer pour cela. Cette Esther est venue ici sans invitation, comme une prostituée publique.»
Consternée et désespérée, Esther resta plantée au centre de la quatrième chambre. Après l'avoir laissée franchir les portes sous leur responsabilité, les gardes des quatre premières chambres avaient perdu leur autorité sur elle, et les gardes des trois autres chambres n'avaient pas encore eu de raison d'intervenir auprès d'elle. Cependant, les courtisans étaient si convaincus qu'Esther allait subir la peine de mort que les fils d'Haman étaient déjà occupés à se partager ses bijoux et à tirer au sort sa pourpre royale. Esther elle-même était parfaitement consciente du danger qui la guettait. Dans sa détresse, elle a imploré Dieu: «Eli, Eli, lamah azabtani», et lui adressa les paroles qui ont trouvé leur place dans le Psautier composé par le roi David (Ps 21). (146) Parce qu'elle mettait sa confiance en Dieu, il répondit à sa demande et lui envoya trois anges pour l'aider: l'un enveloppa son visage des « fils de la grâce «, le second éleva sa tête et le troisième tira le sceptre d'Assuérus jusqu'à ce qu'il la touche. (147) Le roi tourna la tête pour ne pas voir Esther, mais les anges le forcèrent à regarder de son côté et à être conquis par son charme séduisant. (148)
En raison de son long jeûne, Esther était si faible qu'elle ne pouvait pas tendre la main vers le sceptre du roi. L'archange Michel dut l'en approcher. Assuérus dit alors: «Je vois que tu dois avoir une requête très importante à proférer, sinon tu n'aurais pas risqué ta vie délibérément. (149) Je suis prêt à te l'accorder, jusqu'à la moitié du royaume. Il n'y a qu'une seule requête que je ne puisse accorder, c'est la restauration du Temple. J'ai prêté serment à Géshem l'Arabe, à Sanballat le Horonite et à Tobie l'Ammonite, de ne pas permettre qu'il soit rebâti, par crainte des Juifs, de peur qu'ils ne se soulèvent contre moi.» (150)
Pour l'instant, Esther s'abstient de formuler sa requête. Tout ce qu'elle demande, c'est que le roi et Haman viennent au banquet qu'elle se propose de donner. Elle avait de bonnes raisons de se comporter ainsi. Elle souhaitait désarmer les soupçons d'Haman quant à son origine juive et amener ses compatriotes juifs à placer leur espoir en Dieu et non en elle. En même temps, elle voulait susciter la jalousie du roi et des princes à l'égard d'Haman. Elle était tout à fait prête à sacrifier sa propre vie, si ses stratagèmes pouvaient aussi emporter celle d'Haman. (151) Lors du banquet, elle favorisa Haman de telle manière qu'Assuérus ne pouvait qu'être jaloux. Elle approcha sa chaise de celle d'Haman, et quand Assuérus lui tendit sa coupe de vin pour qu'elle en boive la première, elle la passa à son ministre.
Après le banquet, le roi réitèra sa question et affirma à nouveau qu'il exaucerait tous les souhaits d'Esther, quel qu'en soit le prix, à l'exception de la restauration du Temple. Esther, cependant, n'était pas encore prête ; elle préfèra attendre un jour de plus avant d'entrer en conflit avec Haman. Elle avait sous les yeux l'exemple de Moïse qui, lui aussi, avait eu besoin d'un jour de préparation avant d'aller affronter Amalek, l'ancêtre d'Haman. (152)
Trompé par l'attention et la distinction que lui accordait Esther, Haman se sentait à l'aise dans sa position, s'enorgueillissant non seulement de l'amour du roi, mais aussi du respect de la reine. Il se sentait l'être le plus privilégié de tout le vaste royaume gouverné par Assuérus (153).
Rempli d'une arrogante suffisance, il passa devant Mardochée, qui non seulement refusa de lui rendre les honneurs décrétés en son nom, mais, de plus, lui montra son genou sur lequel était inscrit l'acte de vente par lequel Haman était devenu l'esclave de Mardochée. (154) Doublement et triplement furieux, il résolut de faire du Juif un exemple. Mais il ne pouvait se contenter d'infliger la mort d'un simple coup de pied.
En arrivant chez lui, il fut déçu de ne pas trouver sa femme Zeresh, la fille du satrape perse Tattenai. Comme toujours lorsque Haman était à la cour, elle avait rejoint ses amants. Il la fit venir avec ses trois cent soixante-cinq conseillers, et c'est avec eux qu'il tint conseil sur le sort à réserver à Mardochée. (155) Montrant une représentation de sa chambre des trésors, qu'il portait sur sa poitrine, (156) il dit: «Et tout cela n'a aucune valeur à mes yeux quand je regarde Mardochée, le Juif. Ce que je mange et ce que je bois perd sa saveur, si je ne pense qu'à lui.» (157)
Parmi ses conseillers et ses fils, au nombre de deux cent huit, aucun n'était aussi intelligent que Zéresh, sa femme. Elle prit la parole: «Si l'homme dont tu parles est un Juif, tu ne pourras rien faire contre lui, si ce n'est par la sagacité. Si tu le jettes au feu, cela n'aura aucun effet sur lui, car Hanania, Mischaël et Azaria sont sortis indemnes de la fournaise ; Joseph a été libéré de prison ; Manassé a prié Dieu, qui l'a entendu et l'a sauvé de la fournaise ; le chasser dans le désert est inutile, car tu sais que le désert n'a fait aucun mal aux Israélites qui l'ont traversé ; lui crever les yeux ne sert à rien, car Samson aveugle a fait plus de mal que Samson qui voyait. Pendez-le donc, car aucun Juif n'a jamais échappé à la mort par pendaison». (158)
Haman fut satisfait des paroles de sa femme. Elle fit venir des artisans du bois et du fer, les premiers pour ériger la croix, les seconds pour fabriquer les clous. Leurs enfants dansaient dans l'allégresse, tandis que Zéresh jouait sur le cithéron, et Haman, dans sa joie, disait: «Je donnerai un salaire abondant aux ouvriers du bois, et j'inviterai à un banquet les ouvriers du fer.»
Lorsque la croix fut achevée, Haman la testa lui-même pour s'assurer qu'elle fonctionnait bien. Une voix céleste se fit entendre: «C'est bon pour Haman le méchant, et c'est bon pour le fils d'Hammedatha.» (159)

2612 Bible des peuples sur verset 2018-11-25: Remarquer ce paragraphe où l’on parle d’Assuérus comme s’il était un Dieu. C’est pourtant le même roi païen dont Esther parlait avec mépris au chapitre précédent. En voici la raison : les païens obéissaient à leurs rois comme s’ils étaient dieux, et au lieu de s’opposer à eux — ce qui leur aurait amené des persécutions — les Juifs entraient dans le jeu. Ils adressaient au roi leurs louanges avec un double langage ; ils pensaient : ce que je dis de Monseigneur le roi, je l’applique à mon Seigneur au plus profond de moi (voir la même attitude dans Judith 12.14). Ce dialogue entre Esther et Assuérus a donc été écrit comme une parabole : Assuérus personnifie le roi tout puissant qui cède devant la confiance hardie d’Esther et l’accueille comme une sœur, montrant une tendresse qu’elle n’aurait jamais pu imaginer. Dieu aime trop celle qu’il aime pour supporter longtemps la vue de son angoisse, et il lui accorde le salut de son peuple. Tout cela nous aide à comprendre pourquoi l’Église se souvient du livre d’Esther lorsqu’elle fait l’éloge de Marie et parle de son intercession pour nous auprès du Christ.

( Ps 21,2 , )
5,2 Levant son sceptre d’or, il le posa sur le cou d’Esther, puis il l’embrassa en disant : « Parle-moi ». « Seigneur, lui dit-elle, je t’ai vu pareil à un ange de Dieu. Mon cœur a été troublé, j’ai eu peur de ta gloire. Car tu es admirable, Seigneur, et ton visage est merveilleux. » Tandis qu’elle parlait, elle tomba de faiblesse. Le roi était bouleversé, et toute sa suite la réconfortait. ( ) 5,3 Le roi lui demanda : « Qu’y a-t-il, reine Esther ? Quelle est ta requête ? Quand ce serait la moitié du royaume, cela te serait accordé. » ( ) 5,4 Esther dit : « S’il plaît au roi, que le roi vienne aujourd’hui avec Amane au banquet que je lui ai préparé. » ( ) 5,5 Le roi dit alors : « Allez vite chercher Amane, pour répondre à l’invitation d’Esther ! » Le roi et Amane vinrent au banquet préparé par Esther. ( ) 5,6 Au cours du banquet, le roi dit de nouveau à Esther : « Quelle est ta demande ? Cela te sera accordé. Quelle est ta requête ? Quand ce serait la moitié du royaume, ce sera réalisé. » ( )



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