Lecture d'un commentaire (3352)


Mt 23,1

Commentaire: MATTHIEU ET LES PHARISIENS
L’Évangile de Matthieu, écrit sans doute deux ou trois ans après la rupture de l’an 62, adopte une position assez polémique vis-à-vis d’eux, du fait qu’ils représentaient un judaïsme adversaire de l’Église. Parlant des Pharisiens du temps de Jésus, il tend à voir en eux ses principaux ennemis. Mais le fait qu’il déforme en cela une réalité historique que Luc rapporte plus objectivement ne nous autorise en rien à rejeter son témoignage sur le point essentiel : il y a une opposition fondamentale entre le pharisaïsme et l’Évangile. Le livre de Matthieu est Parole de Dieu ; il nous donne sur les situations auxquelles Jésus a dû faire face, la vision que Dieu a voulu que nous en gardions. Il est vrai que, sous divers aspects, Jésus a fait sienne l’interprétation que les Pharisiens donnaient de la Bible, et il y en eut parmi ses premiers disciples. Mais leur religion faite en grande partie de droits et de devoirs était incompatible avec une nouvelle vision résultant du seul fait que Jésus était le Fils, livré par le Père pour sauver les pécheurs. La polémique de ce chapitre 23 ne peut pas laisser indifférents les chrétiens d’aujourd’hui, vu que le pharisaïsme était l’expression à cette époque d’une attitude religieuse et de forces confessionnelles qui ne sont pas moins vigoureuses à notre époque. Bien des auteurs chrétiens ont parlé des Pharisiens comme si tous avaient été des hypocrites et des gens de mauvaise foi. Quand on lit leurs commentaires on soupçonne que ces auteurs sentaient, mais ne voulaient pas reconnaître, qu’ils occupaient dans la société chrétienne la même position qu’avaient occupée les Pharisiens, et qu’ils tombaient sous le coup des mêmes reproches : il leur fallait noircir les Pharisiens pour s’en distinguer. Aujourd’hui en revanche, certains voudraient, non seulement justifier les Pharisiens de ces accusations imméritées, mais ignorer et même rejeter les avertissements de l’Évangile à leur endroit. La raison d’une telle ferveur est peut-être la même qui avait inspiré dans les temps passés des réquisitoires injustes : on canonise aujourd’hui les Pharisiens dans la mesure où l’on occupe leur place. Et l’on se cache à soi-même qu’on occupe à son tour le siège des sages et des prudents auxquels n’a pas été révélé le mystère de Jésus.


Source: Bible des peuples