Lecture d'un commentaire (18894)


Ex 1,2

Commentaire: L'AVERTISSEMENT DE SIMON CONTRE L'ENVIE
De même que Ruben confessa son péché sur son lit de mort et recommanda à ses enfants et à sa famille de se garder de l'impudicité, vice qui avait amené sa chute, de même Simon, sur le point de mourir, rassembla ses fils autour de lui et confessa le péché qu'il avait commis. Il s'était rendu coupable d'une jalousie sans bornes à l'égard de Joseph, et il prit la parole: «J'étais le second fils de mon père Jacob, et ma mère Léa m'appela Simon, parce que le Seigneur avait exaucé sa prière. Je me fortifiais, je ne reculais devant aucune action, je ne craignais rien, car mon cœur était dur, mon foie inflexible, et mes entrailles sans pitié. Dans ma jeunesse, j'étais jaloux de Joseph, car notre père l'aimait plus que nous tous, et je résolus de le tuer. Car le prince des tentations a envoyé l'esprit de jalousie s'emparer de moi, et il m'a aveuglé au point que je n'ai pas considéré Joseph comme mon frère, et je n'ai pas même épargné mon père Jacob. Mais son Dieu et le Dieu de ses pères a envoyé son ange et l'a sauvé de mes mains.
Pendant que j'allais à Sichem chercher de l'onguent pour les troupeaux et que Ruben était à Dothan, où se trouvaient toutes nos provisions et tous nos magasins, notre frère Juda vendit Joseph aux Ismaélites. A son retour, quand il apprit ce qui s'était passé, Ruben fut très attristé, car il avait voulu sauver Joseph et le ramener à notre père. Quant à moi, ma colère s'enflamma contre Juda, qui l'avait laissé s'échapper vivant. Ma colère me poursuivit pendant cinq mois. Mais le Seigneur m'empêcha d'utiliser la force de mes mains, car ma main droite se dessécha pendant sept jours. Je compris alors que ce qui s'était passé était pour le bien de Joseph. Je me repentis et priai Dieu de me rendre ma main et de me préserver désormais de toute espèce de souillure, d'envie et de folie. Pendant deux ans, je me suis livré au jeûne et à la crainte de Dieu, car j'ai compris que la rédemption de la jalousie ne pouvait venir que de la crainte de Dieu.
Mon père, me voyant abattu, me demanda la cause de ma tristesse, et je lui répondis que je souffrais du foie ; mais, en vérité, je me lamentais plus que tous mes frères, puisque j'avais été la cause de la vente de Joseph. Lorsque nous descendîmes en Égypte et que Joseph m'enchaîna comme un espion, je ne m'affligeai pas, car je savais au fond de mon cœur que ma souffrance n'était qu'un juste châtiment. Mais Joseph était bon, l'esprit de Dieu habitait en lui. Compatissant et miséricordieux comme il l'était, il ne m'a pas gardé rancune de mes mauvaises actions envers lui, mais il m'a aimé du même amour que celui qu'il a montré aux autres. Il nous a tous honorés, et il nous a donné de l'or, du bétail et des denrées. Maintenant, mes chers enfants, aimez-vous les uns les autres, chacun son frère, d'un coeur pur, et ôtez du milieu de vous l'esprit de jalousie.
Comme Ruben, Simon recommanda à ses fils de se garder de l'impudicité, car ce vice est la mère de tous les maux. Il sépare l'homme de Dieu et l'abandonne à Behar. Telles furent les dernières paroles de son exhortation: «Dans les écrits d'Hénoch, j'ai vu que vos fils se corrompraient par l'impudicité et qu'ils maltraiteraient les fils de Lévi par l'épée. Mais ils ne pourront rien contre Lévi, car la guerre qu'il mènera est la guerre du Seigneur, et il vaincra toutes vos armées. Vous serez dispersés comme un petit reste parmi Lévi et Juda, et aucun d'entre vous ne s'élèvera pour être juge ou roi de notre peuple, comme mon père Jacob l'a prophétisé dans sa bénédiction».
Après avoir achevé d'exhorter ses fils, Simon mourut et fut recueilli auprès de ses pères, à l'âge de cent vingt ans. Ses fils le mirent dans un cercueil de bois imputrescible, afin de porter ses ossements à Hébron, comme ils le firent, en secret, pendant la guerre entre les Égyptiens et les Cananéens. Ainsi firent toutes les tribus pendant la guerre: elles emportèrent chacune les dépouilles de leur père d'Égypte à Hébron. Seuls les ossements de Joseph restèrent en Égypte jusqu'à ce que les Israélites quittent le pays, car les Égyptiens les gardaient dans leurs salles de trésor royales. Leurs magiciens les avaient avertis que si les ossements de Joseph étaient emportés d'Égypte, une grande obscurité envelopperait tout le pays, et ce serait un grand malheur pour les Égyptiens, car personne ne pourrait reconnaître son voisin, même à la lumière d'une lampe (8).


Source: Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg