Epitre aux Romains de Paul
1,12 je veux dire, afin que nous soyons réconfortés ensemble chez vous, par la foi que nous avons en commun, vous et moi. ( ) 1,13 Je ne veux pas vous le laisser ignorer, frères : j’ai bien souvent eu l’intention de venir chez vous, et j’en ai été empêché jusqu’à maintenant ; je pensais obtenir chez vous quelque fruit comme chez les autres nations païennes. ( Rm 15,28 , Rm 15,29 Rm 15,30 ) 1,14 J’ai des devoirs envers tous : Grecs et non-Grecs, savants et ignorants ; ( Rm 15,27 , ) 1,15 de là cet élan qui me pousse à vous annoncer l’Évangile à vous aussi qui êtes à Rome. ( ) 1,16 En effet, je n’ai pas honte de l’Évangile, car il est puissance de Dieu pour le salut de quiconque est devenu croyant, le Juif d’abord, et le païen. ( )

1,17 Dans cet Évangile se révèle la justice donnée par Dieu, celle qui vient de la foi et conduit à la foi, comme il est écrit : Celui qui est juste par la foi, vivra.


4421 Bible des peuples sur verset 2019-01-05: Justifie… justice… juste… Dans la Bible le Dieu juste est celui qui intervient pour remettre le monde en ordre. Et dans le Nouveau Testament, la “justice” de Dieu fait que l’homme soit “juste”, c’est-à-dire droit à ses yeux. De fait, ces mots “justice” et “juste” avaient pris un sens très large dans le vocabulaire chrétien et finissaient par désigner simplement tout ce qui est bien, nous dirions : une vie telle que Dieu veut. Dans cette lettre tout spécialement, Paul nous montre comment Dieu intervient pour réhabiliter l’homme pécheur, pour le remettre en ordre intérieurement, mais aussi pour régler ses comptes avec Dieu en lui pardonnant ses fautes. Le “juste” est un peu un saint, au sens où nous l’entendons aujourd’hui, ou pour être plus modeste, il a été remis en ordre par Dieu. C’est pourquoi nous traduirons aussi “Dieu nous justifie” par : Dieu nous fait justes et saints, ou : Dieu nous donne la vraie droiture. Les Juifs pensaient, comme beaucoup d’autres, que l’homme devient bon par ses propres efforts. Paul réplique que la justice (ou droiture) qui intéresse Dieu est tout autre chose : elle va bien au-delà de ce que l’homme peut par lui-même. Nous sommes justes et amis de Dieu quand il nous fait approcher de lui et nous sanctifie par grâce. Les apôtres proclamaient l’Évangile à deux catégories de personnes : — les Juifs que Dieu avait préparés à recevoir un Sauveur, — les Grecs (c’est-à-dire ceux qui parlaient grec). Pour un Juif, tous les autres sujets de l’empire romain étaient des Grecs. Ces peuples ne connaissaient pas la parole de Dieu et n’espéraient rien de lui. Mais Paul montre que tous, même les Juifs, ont besoin de l’Évangile : tous vivent dans le péché.

4423 Bible des peuples sur verset 2019-01-05: LE VOCABULAIRE DE LA JUSTIFICATION Au moment où nous abordons les textes si importants de Paul sur la “justification”, il est bon de préciser le sens des mots qu’il emploie et qu’il nous faudra bien exprimer en notre langage qui n’est plus le sien. La différence d’ailleurs n’est pas seulement entre le grec et le français ; Paul emprunte ici les mots de la Bible grecque des Septante, laquelle avait fixé dans une certaine mesure le langage religieux des Juifs de langue grecque. Notre vocabulaire de la justification et de la grâce a été fortement marqué par d’interminables controverses théologiques et par les polémiques entre Catholiques et Protestants du seizième au dix-huitième siècle. Nos ancêtres d’avant le Christ n’en étaient pas là. Le vocabulaire de la rédemption, du péché, de la justification, est parti de l’expérience de l’alliance entre une personne, ou un groupe, et une autre personne ou un autre groupe plus fort qui va devenir son protecteur. Le plus fort concède une alliance avec des devoirs réciproques. Il arrive que l’inférieur se rebelle, qu’il pèche contre son suzerain (2Rois 18.14 ; Ézékiel 17.15) et le trahisse. De son côté le suzerain peut apprécier la fidélité de son allié et le considérer comme juste. Nous avons là le vocabulaire habituel de toute alliance. Bien sûr, on ne doute pas de la miséricorde de Dieu, on sait qu’il pardonne, on sait qu’on a moins de mérites qu’on n’a commis de rébellions, mais on fait ce qu’on peut pour être fidèle et on ne doute pas que si l’on met en pratique les commandements de l’Alliance, on méritera un regard favorable de Dieu sur son peuple. Les prophètes feront progresser l’attente du jugement : alors Dieu justifiera les siens, c’est-à-dire qu’il les reconnaîtra comme justes et les épargnera. Une autre idée se fait jour : le peuple a besoin d’une conversion et c’est Dieu qui en prendra l’initiative (1Rois 18.37) : mais ce n’est pas le mot justification. Après l’Exil, dans la prière des Psaumes, nous voyons se développer le désir du croyant sincère d’accomplir de son mieux les préceptes de la Loi, sachant que celui qui les met en pratique vivra par eux (Lévitique 18.5). Sachant sa faiblesse, il ne cessera de demander à Dieu un cœur pur disposé à observer sa Loi. Mais si l’on dit que Dieu justifie, cela signifie toujours qu’il reconnaît la justice de quelqu’un et qu’il la proclame. C’est à peu près ainsi que s’exprimait la foi des croyants d’origine juive, ou convertis à la religion juive à qui Paul s’adressait. Or voici qu’il propose une réorientation radicale des mots et de l’attitude religieuse. Jusque là, la justification dépendait avant tout de l’homme et de sa fidélité à mettre en pratique les préceptes de la Loi. La justice était bien un ensemble de qualités réunies dans le cœur du croyant, mais on les appréciait d’abord comme une perfection morale et légale qui méritait la bienveillance de Dieu. La relation avec Dieu restait en bonne part juridique : la Loi établissait un code de droits et de devoirs, et même si la piété trouvait à s’y exprimer largement, la personne se faisait responsable de sa propre justification. Mais voici que Paul découvre la valeur universelle de la venue du Christ. Par lui, et grâce à la foi, Dieu remet en ordre la personne humaine. Le mot grec que Paul reprend avait deux significations que souvent les traductions ne peuvent bien distinguer : c’était à la fois justice et processus de justification (devenir juste, ou rendre juste, ou reconnaître comme juste). Maintenant ce sera une refonte de la personne au plus profond d’elle-même : la foi chrétienne ouvre l’esprit et le situe au cœur de la vérité. Si le mot justi-fier nous égare, il est facile de le remplacer par d’autres mots français qui ont une origine très proche : recti-fier, ré-habiliter, ré-ordonner, ré-ajuster, ré-former… Mais Paul n’oublie pas le sens premier : lorsque Dieu nous justifie, il réajuste nos comptes avec lui : il nous pardonne nos dettes Ce développement du mot justice s’accompagnera d’une évolution du mot achat ou rédemption (voir la note en Matthieu 20.28). Par ailleurs, le fait que la justice nouvelle soit une perfection intérieure, œuvre de Dieu, amène à resituer l’un par rapport à l’autre les mots saint et juste. Pour l’Ancien Testament, la sainteté est le propre de Dieu, ce qui exprime son mystère, ce qui le maintient à distance de tout ce qui n’est pas lui. Saint s’oppose à profane. On appelle saints, dans le livre de Daniel et dans les Psaumes, les êtres célestes qui sont proches de Dieu, nous dirions : les anges (Daniel 4.10 et 14 ; Psaume 89(88).6). Dans le domaine des terriens, le mot saint s’applique aux personnes et aux choses qui sont consacrées à Dieu, et qui pour autant obéissent à des lois différentes de celles qui sont propres aux profanes ; ainsi sont les prêtres, le Sanctuaire, les objets du culte. Même lorsque Dieu dit à tout le peuple : “Soyez saints parce que je suis saint”, le mot n’a pas le sens que nous lui donnerions aujourd’hui : il associe à l’idée de justice celle d’être un peuple différent des autres parce que consacré à Dieu. Dans l’Ancien Testament, lorsqu’on veut exprimer qu’une personne est parfaite aux yeux de Dieu et qu’elle lui est agréable, on utilise les mots juste ou pieux. Mais à partir du moment où la justice devient une refonte de la personne et lui ouvre l’accès à Dieu le plus direct qui soit, on comprend qu’elle devienne le début d’un processus de sanctification. En deux endroits nous trouvons associés les mots justice et sainteté, et dans un ordre différent (1Corinthiens 6.11 ; Apocalypse 22.11), ce qui montre que ce ne sont pas deux étapes successives, ou deux actions différentes de Dieu, sinon deux mots dont le sens se complète pour une personne familière du langage grec des Septante. Très habituellement, le mot saint garde chez Paul le sens de “consacré à Dieu”, et c’est ainsi que nous rencontrons souvent l’expression “les saints” pour désigner les chrétiens. Mais aussi Paul montre que ceux qui sont ainsi consacrés à Dieu doivent échapper aux modèles que leur offre le monde (Romains 12.2) et mener une vie sans tache et irréprochable selon les critères de Dieu : ils seront saints au sens où nous l’entendons aujourd’hui (1Corinthiens 1.8 ; Colossiens 1.22) ; cette sainteté chrétienne sera une imitation de la perfection divine (Matthieu 5.45).

( )
1,18 Or la colère de Dieu se révèle du haut du ciel contre toute impiété et contre toute injustice des hommes qui, par leur injustice, font obstacle à la vérité. ( 1Th 1,10 , ) 1,19 En effet, ce que l’on peut connaître de Dieu est clair pour eux, car Dieu le leur a montré clairement. ( ) 1,20 Depuis la création du monde, on peut voir avec l’intelligence, à travers les œuvres de Dieu, ce qui de lui est invisible : sa puissance éternelle et sa divinité. Ils n’ont donc pas d’excuse, ( ) 1,21 puisque, malgré leur connaissance de Dieu, ils ne lui ont pas rendu la gloire et l’action de grâce que l’on doit à Dieu. Ils se sont laissé aller à des raisonnements sans valeur, et les ténèbres ont rempli leurs cœurs privés d’intelligence. ( ) 1,22 Ces soi-disant sages sont devenus fous ; ( )