Livre d'Esther
5,9 Ce jour-là, Amane sortit joyeux et le cœur content. Mais lorsque, à la porte du roi, il vit Mardochée qui ne se levait pas et ne se dérangeait pas à sa vue, il fut rempli de fureur contre Mardochée. ( ) 5,10 Mais il se domina et rentra chez lui. Il envoya chercher ses amis et sa femme Zéresh, ( ) 5,11 et, longuement, il leur parla de ses somptueuses richesses, de la multitude de ses fils, de tout ce dont le roi l’avait comblé, pour l’élever et le mettre au-dessus de ses princes et de ses serviteurs. ( ) 5,12 Amane ajouta : « La reine Esther n’a fait venir que moi, avec le roi, au banquet qu’elle a préparé ; bien plus, elle vient de m’inviter encore demain avec le roi. ( ) 5,13 Mais tout cela est sans intérêt pour moi, tant que je verrai Mardochée, le Juif, assis à la porte du roi. » ( )

5,14 Sa femme Zéresh et tous ses amis lui dirent alors : « Que l’on dresse une potence de cinquante coudées et, demain matin, demande au roi qu’on y pende Mardochée. Puis va te réjouir au banquet du roi ! » Le conseil plut à Amane, et il fit préparer la potence.


19229 Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg sur verset 2023-10-31: LA NUIT PERTURBÉE
La nuit au cours de laquelle Haman a érigé la croix pour Mardochée était la première nuit de la Pâque, la nuit même au cours de laquelle des miracles sans nombre avaient été accomplis pour les Pères et pour Israël. Mais cette fois-ci, la nuit de joie se transformait en une nuit de deuil et d'angoisse. Partout où il y avait des Juifs, ils passèrent la nuit à pleurer et à se lamenter. Les plus grandes terreurs attendaient Mardochée, car son propre peuple l'accusait d'avoir provoqué ses malheurs par son comportement hautain à l'égard d'Haman. (160)
L'excitation et la consternation règnaient au ciel comme sur la terre. (161) Après s'être assuré que la croix destinée à son ennemi était bien construite, Haman se rendit au Bet ha-Midrash, où il trouva Mardochée et tous les écoliers juifs, au nombre de vingt-deux mille, dans les larmes et le chagrin. Il ordonna de les enchaîner, en disant: «Je tuerai d'abord ceux-ci, puis je pendrai Mardochée.» Les mères se hâtèrent d'apporter du pain et de l'eau, et d'inciter leurs enfants à prendre quelque chose avant d'aller au-devant de la mort. Mais les enfants posèrent les mains sur leurs livres et dirent: «Notre maître Mardochée est vivant, nous ne mangerons ni ne boirons, mais nous périrons épuisés par le jeûne.» Ils roulèrent leurs rouleaux sacrés et les remirent à leurs maîtres en disant: «Pour notre dévouement à l'étude de la Torah, nous avions espéré être récompensés par une longue vie, conformément à la promesse faite dans les Saintes Écritures. Comme nous n'en sommes pas dignes, enlevez ces livres !». Les cris des enfants et des maîtres dans le Bet ha-Midrash, et les pleurs des mères à l'extérieur, unis aux supplications des Pères, parvinrent jusqu'au ciel à la troisième heure de la nuit, et Dieu dit: «J'entends la voix des doux agneaux et des brebis. Moïse se leva et s'adressa à Dieu en ces termes: «Tu sais bien que ces voix ne sont pas celles d'agneaux et de brebis, mais celles des jeunes d'Israël qui, depuis trois jours, jeûnent et languissent dans les fers, pour être égorgés le lendemain, à la grande joie de l'ennemi juré».
Dieu eut alors pitié d'Israël, à cause de ses petits innocents. Il brisa le sceau auquel était attaché le décret céleste d'anéantissement, et il mit en pièces le décret lui-même. (162) A partir de ce moment, Assuérus s'agita, et le sommeil fuit ses yeux, afin que s'accomplisse la rédemption d'Israël. Dieu fit descendre Michel, le chef des armées d'Israël, qui devait empêcher le roi de dormir. (163) L'archange Gabriel descendit et jeta le roi à terre, hors de son lit, pas moins de trois cent soixante-cinq fois, en lui murmurant continuellement à l'oreille: «O ingrat, récompense celui qui mérite d'être récompensé».
Pour expliquer son insomnie, Assuérus pensa qu'il avait peut-être été empoisonné et il s'apprêtait à ordonner l'exécution des personnes chargées de préparer son repas. Mais ceux-ci réussirent à le convaincre de leur innocence, en lui signalant qu'Esther et Haman avaient partagé son repas du soir avec lui, sans en ressentir les effets désagréables. (164) C'est alors que des soupçons contre sa femme et son ami commencèrent à naître dans son esprit. Il les accusa intérieurement d'avoir conspiré pour le mettre hors d'état de nuire. Il chercha à chasser cette pensée en se disant que si une conspiration avait existé contre lui, ses amis l'en auraient averti. Mais cette réflexion en entraîna d'autres: Avait-il des amis ? N'était-il pas possible qu'en laissant des services précieux sans récompense, il ait perdu les sentiments amicaux à son égard ? (165) Il ordonna donc qu'on lui lise les chroniques des rois de Perse. Il comparerait ses propres actes avec ceux de ses prédécesseurs et chercherait à savoir s'il pouvait compter sur des amis. (166)
Ce qu'on lui lit ne lui rendit pas sa tranquillité d'esprit, car il vit devant lui un pauvre homme qui n'était autre que l'ange Michel et qui l'appelait sans cesse: «Haman veut te tuer et devenir roi à ta place. Que ceci te serve de preuve que je te dis la vérité: tôt le Mtn, il se présentera devant toi et te demandera la permission de tuer celui qui t'a sauvé la vie. Et lorsque tu lui demanderas quel honneur doit être fait à celui que le roi se plaît à honorer, il demandera qu'on lui donne l'habit, la couronne et le cheval du roi comme signes de distinction». (167)
L'excitation d'Assuérus ne s'apaisa que lorsqu'on atteignit le passage des chroniques décrivant la loyauté de Mardochée. Si le lecteur avait été consulté, Assuérus n'aurait jamais entendu ce passage, car c'était un fils d'Haman qui occupait le poste de lecteur, et il souhaitait passer l'incident sous silence. Mais un miracle se produisit: les mots furent entendus alors qu'ils n'avaient pas été prononcés !
Les noms de Mardochée et d'Israël eurent un effet apaisant sur le roi, qui s'endormit. Il rêva qu'Haman, l'épée à la main, s'approchait de lui avec de mauvaises intentions, et lorsque, au petit Mtn, Haman entra soudain, sans être annoncé, dans l'antichambre et réveilla le roi, Assuérus fut persuadé de la véracité de son rêve. Le roi fut encore plus remonté contre Haman par la réponse qu'il donna à la question de savoir comment il fallait honorer l'homme que le roi se plaisait à honorer. Se croyant l'objet de la bienveillance du roi, il conseilla à Assuérus de faire revêtir à son favori les habits de couronnement du roi et de lui mettre la couronne royale sur la tête. Devant lui, un des grands du royaume devait courir, faisant office de héraut, proclamant que quiconque ne se prosternerait pas devant celui que le roi se plaît à honorer aurait la tête tranchée et que sa maison serait livrée au pillage.
Haman ne tarda pas à s'apercevoir de son erreur, car il vit le visage du roi changer de couleur à l'évocation du mot couronne. Il prit donc bien soin de ne plus y faire allusion. Malgré cette précaution, Assuérus vit dans les paroles d'Haman une vérification éclatante de sa vision, et il fut persuadé qu'Haman nourrissait des desseins contre sa vie et son trône. (168)

( )
6,1 Or, cette nuit-là, comme le sommeil le fuyait, le roi se fit apporter le livre des Mémoires, les Chroniques, pour s’en faire donner lecture. ( ) 6,2 On y trouva écrit ce que Mardochée avait révélé sur les eunuques du roi, Bigtane et Tèresh, deux des gardiens du seuil, qui avaient cherché à porter la main sur le roi Assuérus. ( ) 6,3 Le roi demanda : « Quels honneurs et quelle distinction ont récompensé Mardochée pour cette révélation ? » Les jeunes serviteurs du roi lui dirent : « Rien n’a été fait pour le récompenser. » ( ) 6,4 Le roi leur demanda alors : « Qui est dans la cour ? » C’était juste le moment où Amane arrivait dans la cour extérieure du palais royal pour demander au roi de faire pendre Mardochée à la potence qu’il avait fait préparer pour lui. ( ) 6,5 Les jeunes serviteurs du roi lui répondirent : « C’est Amane qui se tient dans la cour. » Le roi ordonna : « Qu’il entre ! » ( )



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