Lecture d'un commentaire (9323)


Mt 25,46

Commentaire: Mais, ajoute-t-on encore, Dieu n'a créé aucun corps qui soit sujet à la souffrance, sans être sujet à la mort. Nous répondons qu'il est nécessaire qu'il vive pour souf frir, mais qu'il n'est pas nécessaire que la souffrance lui ôte la vie. Est-ce que toute souffrance donne actuellement la mort à nos corps qui sont cependant mortels? Il est en effet des dou leurs qui produisent cet effet, mais la cause en est que l'union actuelle de l'âme avec le corps ne peut résister, et cède devant des souffrances excessives. Mais alors, la nature du corps au quel l'âme sera unie, et les liens eux-mêmes qui établiront cette union seront à l'épreuve de toutes les douleurs. On ne peut pas dire qu'il n'y aura plus alors de mort; mais la mort sera éternelle, parce que l'âme ne pourra vivre privée de Dieu, et qu'elle ne pourra échapper par la mort aux douleurs du corps. Parmi ceux qui ont nié l'éternité des peines de l'enfer, le plus mi séricordieux est Origène qui a cru que le démon lui-même et ses anges, après de rigoureux et longs supplices proportionnés à leurs fautes, obtiendraient leur délivrance, et rentreraient dans la société des saints anges. Mais l'Église l'a condamné avec raison pour cette erreur et d'autres encore; et il perdit jusqu'à ces faux dehors de miséricorde en créant aux saints de véritables souffrances, qui seraient pour eux des châtiments expiatoires, et une félicité mensongère, où leur joie n'aurait aucune sécurité, parce qu'elle ne serait point éternelle. Mais une erreur bien différente, et qui part toujours d'un faux sentiment de compassion, est celle qui prétend que les souffrances des hommes condamnés dans ce jugement n'auront qu'un temps, et qu'après avoir été délivrés tôt ou tard, ils jouiront d'un bonheur éternel. Mais pourquoi cette miséricorde, qui se répand sur toute la nature humaine, se tarit-elle aussitôt qu'elle arrive à la nature angélique?


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)