Lecture d'un commentaire (9318)


Mt 25,46

Commentaire: Il en est d'autres encore qui promettent la délivrance des peines éternelles, non pas à tous les hommes indistinctement, mais seulement à ceux qui ont été justifiés par le baptême de Jésus-Christ, et qui participent à son corps, quelle qu'ait été d'ailleurs leur vie; et ils se fondent sur les paroles du Seigneur: «Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement». Il en est d'autres qui font cette promesse, non pas à tous ceux qui ont participé au sacrement du Christ, mais aux seuls catholiques, bien que leur vie soit ré préhensible, et cela parce qu'ils ont mangé en réalité le corps de Jésus-Christ, en faisant partie de son corps mystique qui est l'Église; et ils leur garantissent ce bonheur quand même ils se raient tombés plus tard dans l'hérésie ou dans l'idolâtrie. Il en est encore qui s'appuient sur ces paroles du Sauveur: «Celui qui aura persévéré jusqu'à la fin, sera sauvé» ( Mt 24,13 ), pour promettre exclusivement bonheur éternel à ceux qui persévéreront dans Église catholique, quoiqu'ils y vivent d'une manière déréglée, parce que, disent-ils, en vertu du fondement de foi qu'ils auront conservée, ils seront sauvés par feu ( 1Co 3,15 ) qui doit devenir supplice des méchants au dernier jour. Mais Apôtre condamne toutes ces erreurs par ces paros: «Il est aisé de connaître s oeuvres de chair qui sont impureté, forni cation, et autres crimes sembbs, et je décre que ceux qui s commettent, ne posséderont pas royaume de Dieu» ( Ga 5,21 ). Si quelqu'un, en effet, préfère s choses de terre à Jésus-Christ, bien qu'il paraisse avoir foi de Jésus-Christ, Jésus-Christ n'est cependant pas fondement ( 1Co 3,11 ) de ses oeuvres, puisqu'il lui préfère des biens périssables; mais s'il fait plus, et qu'il commette l'iniquité, ce n'est plus seulement le second rang, mais le dernier, qu'il donne à Jésus-Christ. J'en ai rencontré aussi qui pensent que la peine des flammes éternelles n'atteindra que ceux qui auront omis d'expier leurs péchés par de dignes aumônes; c'est pour cela, disent-ils, que le souverain juge n'a voulu rappeler au jugement dernier que les aumônes qui ont été faites ou omises. Mais celui qui expie ses péchés par des aumônes proportionnées à ses fautes, devrait commencer par se faire l'aumône à lui-même; car c'est une indignité que de se refuser à soi-même ce qu'il accorde à son prochain, lorsqu'il entend le Seigneur lui dire: «Vous aimerez votre prochain comme vous-même», et encore: «Ayez pitié de votre âme, en vous efforçant de plaire à Dieu». Or, comment peut-on dire qu'il expie dignement ses péchés par ses aumônes, lui qui ne fait point à son âme l'aumône de plaire à Dieu? Il faut donc faire des aumônes pour nous rendre Dieu favorable lorsque nous le prions de nous pardonner nos péchés passés, mais non pas dans la pensée que nous pouvons persévérer dans ces mêmes pé chés, et que nous achetons par nos aumônes la liberté de faire le mal. Et si le Seigneur promet qu'il placera à sa droite ceux qui ont fait l'aumône, et à sa gauche ceux qui ont négligé ce devoir de charité, c'est qu'il veut nous apprendre toute la puissance de l'aumône pour effacer les péchés passés, mais non pas assurer à jamais l'impunité de ceux que l'on pourrait commettre.


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)