Lecture d'un commentaire (9159)


Mt 24,45

Commentaire: Ou bien, on appelle ordinairement fidèle, celui qui a fait des progrès dans la foi, bien qu'il n'ait pas encore atteint la perfection; et prudent, celui qui a reçu de la nature la subtilité et la pénétration d'esprit. - Or, en considérant attentivement, on trouvera un grand nombre d'hommes fidèles, qui sont animés dans leurs actions du zèle de la foi; mais il en est peu qui soient prudents: «Car Dieu a choisi ce qu'il y a d'insensé selon le monde». ( 1Co 1,27 ) Réciproquement, on rencontrera des hommes d'un esprit subtil et prudent, et d'une foi médiocre; mais il est très-rare de trouver réunies dans une même personne la prudence et la fidélité. Cependant la prudence est nécessaire pour distribuer la nourriture en temps convenable, et la fidélité pour ne point dérober aux indigents leur subsistance. Il n'est point inutile d'avertir, que dans le sens le plus naturel, nous devons être tout à la fois fidèles et prudents pour administrer les revenus de l'Église. Nous devons être fidèles pour ne point dévorer les richesses des veuves, nous souvenir des besoins des pauvres, ne pas nous autoriser de ces paroles de l'Apôtre: «Le Seigneur a établi que ceux qui prêchent l'Évangile doivent vivre de l'Évangile», pour prendre autre chose que la simple nourriture où les vêtements qui nous sont nécessaires; et ne pas retenir pour nous plus que l'on ne donne à ceux qui sont dans le besoin. Nous devons être prudents pour examiner et comprendre les causes de l'indigence d'un chacun, pour tenir compte de sa position, de son éducation et de ses besoins; car il faut une grande sagesse pour administrer avec soin les revenus de l'Église. Le serviteur doit encore être fidèle et prudent en ne prodiguant point par le désir de faire paraître la sagacité de son esprit la nourriture raisonna ble et spirituelle à ceux qui n'en sont point capables, c'est-à-dire à ceux qui ont bien plus be soin d'instructions, qui leur apprennent à régler leurs moeurs et à rendre leur vie meilleure, que des lumières spéculatives de la science. Cette prudence est encore nécessaire pour ne pas négliger d'expliquer les hautes vérités de la religion aux esprits plus pénétrants, car en se bornant aux vérités élémentaires, on s'exposerait aux mépris de ceux qui ont naturellement une intelligence plus ouverte, ou qui l'ont exercée par l'étude de la philosophie profane.


Source: Origène (Peronne-Vivès 1868)