Lecture d'un commentaire (805)


Mc 9,31

Commentaire: Jésus était occupé à instruire ses disciples. Que leur enseignait-il ? Il est difficile de penser qu’il leur faisait seulement la morale. Il y a bien là un effort très sérieux de Jésus pour faire entrer quelques éléments de base de la compréhension et de l’interprétation des Écritures dans la tête de ces hommes qui, comme lui, n’ont pas eu de maître. Jésus n’a pas eu de maître (Jean 7.15). C’est vrai au sens précis de ce terme : il ne s’est pas attaché à quelque rabbin qui faisait école, se faisant disciple avant d’enseigner lui-même. Et Jésus le dit en un sens beaucoup plus large : il ne se présente pas comme le fidèle interprète de Moïse ou de quelque autre prophète. Si, dans l’Évangile de Jean, Jésus affirme à plusieurs reprises que tout ce qu’il dit, il l’a entendu du Père, Jean ne l’a pas inventé. Et Matthieu non plus n’a pas inventé : Il a été dit (à Moïse), mais moi je vous dis. Si l’évangile nous rapporte certaines discussions dans lesquelles Jésus suit les formes traditionnelles, il n’y a là rien que de très naturel. Mais cela n’empêche pas que Jésus ait su écouter et apprendre les formes de discussion en usage aussi bien dans les offices de la synagogue que dans les cercles qui se formaient autour des rabbins. À l’âge de douze ans il est parmi ceux qui font le cercle dans un coin d’ombre des colonnades du Temple, et il apprend. Il est monté bien des fois au Temple en pèlerinage (c’était obligatoire trois fois par an), et il n’y a pas fait que des prières. Même si les douze avaient la tête dure, ils n’étaient pas des minus, et la tête dure, chez eux, c’était avant tout l’attachement à une sagesse humaine qui n’est pas moins étroite chez les personnes instruites que chez les autres. Il ne faut donc pas s’étonner si, après des mois de vie commune et des centaines heures de patiente formation, les Douze de Jésus avaient acquis une forme d’esprit qui leur permettrait ensuite d’enseigner la communauté chrétienne de façon originale, sans pour autant perdre les formes traditionnelles de l’enseignement biblique. Nous n’avons aucune preuve que les apôtres de Jésus aient mis la main à la rédaction des textes qui sont à la base de nos évangiles synoptiques. Seul le nom de Matthieu y est resté attaché dans les traditions anciennes. Mais imaginer que cette rédaction se soit faite sans eux, ce serait refuser les évidences. Et pour ce qui est du fond, disons, pour l’utilisation des Écritures anciennes comme d’un support prophétique de ce que les apôtres avaient vu en Jésus et de ce qu’ils avaient vécu avec lui, ce sont des choses qu’ils avaient appris de Jésus lui-même. Luc met en bonne place la leçon d’exégèse que le Ressuscité donne à ses apôtres, cela ne signifie aucunement qu’elle soit la première. Selon toute vraisemblance, elle n’a fait que reprendre sous une nouvelle lumière des textes que Jésus avait déjà bien des fois cités et commentés dans les temps antérieurs.


Source: Bible des peuples