Lecture d'un commentaire (7189)


Mt 11,20

Commentaire: On peut dire encore que le Seigneur prévoit avec certitude les grâces auxquelles il a daigné attacher notre délivrance : c'est la prédestination des saints, c'est-à-dire la prescience et la préparation des grâces qui doivent infailliblement sauver ceux qui doivent l'être ; les autres, par un juste jugement de Dieu, sont laissés dans la masse de perdition, comme les habitants de Tyr et de Sidon qui auraient pu croire également s'ils avaient été témoins des nombreux miracles de Jésus-Christ ; mais comme le don de la foi ne leur a pas été accordé, les moyens de croire leur ont été refusés. On peut conclure de là qu'il y a des hommes qui ont naturellement dans leur esprit un don particulier d'intelligence qui les porterait vers la foi, s'ils voyaient des miracles ou s'ils entendaient des paroles conformes aux dispositions de leur âme ; et cependant si, par un profond jugement de Dieu, ils ne sont pas séparés de la masse de perdition par la grâce de la prédestination, ils n'entendront jamais ces paroles divines, ils ne verront jamais ces faits miraculeux qui deviendraient pour eux, s'ils en étaient témoins, des moyens assurés de parvenir à la foi. C'est dans cette masse de perdition que furent laissés les Juifs eux-mêmes qui ne purent croire aux miracles si éclatants qui furent opérés sous leurs yeux, et l'Évangile ne nous a pas caché la raison pour laquelle ils n'ont pu croire : Bien que le Sauveur eût opéré sous leurs yeux d'aussi grands miracles, ils ne pouvaient pas croire, selon ce qu'Isaïe a dit : Il a aveuglé leurs yeux (Is 6, 9 ; Ac 28, 18), et il a endurci urs coeurs. (Jn 12.) Les yeux des Tyriens et des Sidoniens n'étaient donc pas aveuglés de manière à ne pouvoir croire, s'ils avaient vu de semblables miracles ; mais comme ils n'étaient pas prédestinés, il ne leur servit de rien d'avoir pu croire, de même que ce n'eût pas été pour eux un obstacle de ne pouvoir croire si Dieu les eût prédestinés à recevoir la lumière de la loi malgré leur aveuglement, et s'il avait voulu leur ôter leur coeur le pierre, cause de leur endurcissement.


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)