Lecture d'un commentaire (5003)


Ex 10,1

Commentaire: Le rabbin Yossef Albo (Espagne 1380-1444) propose une lecture originale allant à l'encontre de la perception première du texte retenue par la plupart des exégètes et traducteurs.
Il y a des hommes qui se repentent de leurs méfaits par crainte de Dieu et de Son châtiment. Ils croient profondément malgré tout que tout ce qui survient est suscité par Dieu, en rétribution des actes. Ils n'attribuent pas leurs maux à la seule nature et au pur hasard, comme le fit Pharaon qui lorsqu'une plaie avait cessé de ravager l'Egypte, revenait à son premier sentiment (hostile). Ainsi fut-il même après la mort des premiers-nés. Il en vint à considérer que les israélites s'étaient égarés dans le désert et que les calamités de son peuple étaient dues à la malchance, ce qui l'a décidé librement à se jeter à leur poursuite. C'est bien en fait son précédent repentir qui était le fruit de la contrainte exercée par la violence des plaies sur lui, et non un choix délibéré.
Ainsi, quand Dieu "renforce le coeur" des pervers ou "enraidit leur cou", il leur redonne leur pleine liberté de jugement. Les voies de la repentance se retrouvent fermées car libérés qu'ils sont alors de la peur ils pouvent alors de nouveau librement envisager que le mal n'était que le fruit du hasard. C'est en cela que consiste la providence divine: retirer de son coeur la fébrilité qui le saisit en raison de la plaie subie, de sorte qu'il puisse après coup se déterminer sereinement selon sa nature et son libre arbitre, hors de toute contrainte. C'est alors que l'on peut juger si le repentir immédiat correspondait à un choix de conscience ou non. Il faut lire l'action de Dieu comme: J'ai retiré de son coeur la faiblesse qui le saisissait en raison de la plaie, pour le ramener à sa nature et à son choix, de sorte qu'il se mit à prendre en compte les aléas et circonstances entourant l'événement pour se convaincre que la survenance des plaies était purement fortuite. (traité des principes, 4.25).


Source: La Haggada, Rivon Krygier