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Jc 1,1

Commentaire: Les épîtres catholiques Les 7 épîtres catholiques font suite aux lettres de Paul. Il était normal qu’elles occupent cette place vu leur diversité et le fait qu’elles avaient mis plus de temps à faire en leur faveur l’unanimité des Églises. Ce n’est qu’à la fin du troisième siècle qu’elles ont été vraiment reconnues comme écrits apostoliques. Il faut parler à leur propos d’épîtres plutôt que de lettres car, à l’exception des deux lettres très courtes de Jean (2Jean et 3Jean), elles n’ont pas un caractère personnel et sont comme des avertissements adressés à toutes les communautés chrétiennes qu’elles pourront atteindre. Cela n’empêche pas que toutes ont été écrites en un temps déterminé et en fonction des besoins de certaines Églises. Dès le deuxième siècle elles ont reçu le titre de catholiques. On sait que le mot signifie “universel”, mais il a été entendu de diverses façons. En Occident on comprenait plutôt : “reconnues par toutes les Églises”, alors qu’en Orient on comprenait : “destinées à toutes les Églises” Si elles ont été accueillies plus tard, ce n’est pas nécessairement parce qu’elles sont plus tardives. Il ne faut pas avoir peur de le dire, même si de nombreux experts ont voulu qu’elles émanent toutes de personnages anonymes appartenant à la seconde ou à la troisième génération postérieure aux apôtres. Aucun argument n’a été apporté qui puisse invalider l’attribution de la lettre de Jacques, de la première lettre de Pierre et des lettres de Jean aux apôtres dont elles portent le nom, même si les deux premiers ont laissé une certaine liberté de rédaction à leurs secrétaires. Beaucoup, prenant pour référence les premières lettres de Paul, considèrent que ces épîtres traitent de problèmes propres à une époque postérieure et ils les reportent à la fin du premier siècle. C’est exact dans le cas des lettres de Jean, affronté aux spéculations de la gnose, mais pour les autres, aucun argument n’a été apporté qui puisse dire que les problèmes traités, les adversaires qu’elles visent, les besoins nouveaux des communautés n’étaient pas ceux-là même que déjà Paul rencontrait en Asie mineure au moment où il y terminait son œuvre d’évangélisation. Ces lettres ne sont pas moins apostoliques et ne méritent pas moins de considération que celles de Paul. Quels qu’aient été son génie et l’importance unique de son apostolat, cela ne diminue en rien l’intérêt de ce qui se vivait ailleurs. Il faut bien reconnaître qu’un siècle plus tard, plusieurs des villes où Paul avait prolongé son apostolat ne comptaient plus guère dans le monde chrétien. Dans le commentaire de ces épîtres nous aurons l’occasion de montrer les points de contact entre les lettres de Pierre, de Jacques et de Paul. Quand on a renoncé aux hypothèses qui les attribuent à des anonymes et jamais n’expliquent comment elles ont pu être reçues par les Églises les plus diverses, on se rend compte que l’Église n’était pas une galaxie de communautés dispersées, enfermées chacune d’elles dans ses interprétations de la foi et son attachement à tel ou tel apôtre : cercles “johanniques”, communautés “pauliniennes”, communautés “lucaniennes”… Les lettres et les nouvelles circulaient rapidement d’une rive à l’autre de la Méditerranée, un langage commun se mettait en place qui allait se fixer dans les formules du Credo, et l’Église des apôtres était une réalité. Épître de Jacques Qui est ce Jacques ? Sans doute le “frère du Seigneur” tout juste mentionné dans l’évangile à propos de sa mère (Marc 6.3 ; 15.40 ; 16.1). Et pourtant il est favorisé d’une apparition particulière de Jésus ressuscité (1Corinthiens 15.7), et c’est à lui semble-t-il que Pierre, au moment d’entrer dans la clandestinité, confie l’Église de Jérusalem (Actes 12.17 ; 15.13 ; 21.18). Dans la suite il semble avoir été considéré comme le responsable de toutes les communautés chrétiennes à majorité juive établies en Palestine, Syrie et Cilicie (voir Actes 15.13-29). Bien que la lettre porte son nom, il a fallu attendre le quatrième siècle pour qu’elle soit reconnue par l’ensemble des Églises, mais cela ne préjuge pas de la date à laquelle elle a été écrite. Aujourd’hui on fera remarquer que la qualité du style, à la hauteur de ce que pouvaient exiger les communautés juives du monde grec, suppose l’intervention d’un rédacteur plus lettré que ce Jacques de Nazareth. Il est bien évident que Jacques, tout comme Pierre et même Paul, a fait appel à un secrétaire qui peut avoir été, comme pour la lettre de Pierre et certaines lettres de Paul, beaucoup plus qu’un scribe à qui l’on dicte le texte. Un des points de cette lettre qui ont le plus attiré l’attention est l’insistance très forte de Jacques sur l’inutilité d’une foi qui ne se traduit pas par des actes (2.14-26). Cette insistance contraste avec les affirmations de Paul qui, tout spécialement en Galates 5 et Romains 4, affirme que nous sommes sauvés par la foi et non par les œuvres. Il est impossible de nier la volonté de se corriger l’un l’autre, car une étude comparée des épîtres oblige à dire que Jacques connaissait la première lettre de Paul aux Corinthiens quand il a écrit celle-ci. Cependant Paul, qui va réagir très violemment à propos de la foi et des œuvres, n’a pas vu que du négatif chez Jacques ; il a repris à son tour plusieurs des formules et des images de la lettre de Jacques, aussi bien dans la lettre aux Galates que dans la deuxième aux Corinthiens. Les textes des Actes relatifs au concile de Jérusalem invitent à ne pas forcer l’opposition entre ces deux apôtres (voir les notes de Actes 15) ; Paul, qui critique durement l’entourage de Jacques, semble avoir eu pour lui personnellement plus que du respect. Ici, s’adressant à ses fidèles de Jérusalem, Jacques leur enseigne des choses simples et pratiques inspirées de la sagesse de l’Ancien Testament. La religion authentique se reconnaît à la façon dont nous vivons et traitons ceux qui nous entourent. Cette lettre est l’écrit du Nouveau Testament qui dénote le plus de parenté avec l’Évangile de Matthieu, même s’il s’agit de thèmes qui sont communs à tous les écrits apostoliques ; on y retrouvera en particulier les échos du Sermon sur la Montagne. Elle nous donne comme un autre versant de la vie des communautés juives de Palestine et de Syrie, complétant l’image négative qu’on pourrait en retenir si l’on s’en tenait à la difficulté que beaucoup de leurs membres éprouvaient pour se libérer de la loi de Moïse. La lettre de Jacques rappelle, comme l’Évangile de Matthieu, que la Loi éduque pour la liberté (2.12). Elle est à sa façon une voie royale (2.8) pour ceux qui cherchent la perfection. La lettre de Jacques, compte tenu de ce que nous avons dit, doit avoir été écrite en 56 ou 57. De toute façon, on sait que Jacques mourut lapidé en 62.


Source: Bible des peuples