Lecture d'un commentaire (3844)


He 1,1

Commentaire: Il est difficile de lire ce paragraphe sans qu’il évoque pour nous le grand texte de Colossiens 1.15-20. Il est certain que l’auteur avait lu ou même tenait sous les yeux le texte de cette épître. Paul mettait le Christ bien au-dessus des anges ou pouvoirs cosmiques, ici se multiplient les citations bibliques pour justifier cette différence. Paul, parlant de l’œuvre créatrice, situait le Christ comme le Premier né incréé de la création. Ici le Christ est le Premier né, sans plus ; il est le rayonnement du Père, par qui tout a été créé. Le Christ image, selon Colossiens, est ici l’irradiation, une notion non moins riche. La vision grandiose de Paul qui s’inspirait des textes de l’Ancien Testament sur la Sagesse (Proverbes 8.22) mais situait le Fils bien plus haut que la Sagesse se retrouve ici même si Paul n’est pas l’auteur. Nous écrivons le Fils. Le texte grec dit un Fils, non pour laisser la place à d’autres mais pour mettre en relief la différence des personnages : des prophètes… un Fils. Héritier de toutes choses. C’est-à-dire qu’il hérite des promesses faites à Abraham (Genèse 15.3) à David (1Chroniques 17.11) au peuple juif (Daniel 7.13). Mais en grec le mot toutes choses désigne aussi l’univers, et nous retrouvons Colossiens 1.16 : il est le destinataire de l’œuvre entière de Dieu, ce qui n’était pas le cas de la Sagesse. Le Fils ne risque pas d’être compris comme une figure de style, ni même comme une certaine manifestation de Dieu, comme l’expression d’une des qualités divines, car le texte grec dit : “il est le caractère de la substance (de Dieu)”. Rappelons que le mot grec substance désigne le fond de l’être par-dessous ses propriétés ou ses manifestations : de là notre traduction. Et le “caractère” signifie la marque imprimée par un sceau : en langage moderne nous parlerions d’un négatif de l’être même de Dieu. Lui qui soutient toutes choses. Ce Fils, Verbe et Sagesse, entreprend personnellement l’œuvre de la rédemption comme une conséquence de son rôle dans l’univers qu’il maintient dans la durée des temps. Il est donc l’intermédiaire entre le Dieu créateur et rédempteur et sa création mais loin d’être une notion abstraite, il est pleinement personne et en lui s’exprime la richesse de l’être du Dieu-Amour. En divers paragraphes on retrouvera les mêmes thèmes que dans les Colossiens ou les Éphésiens, et parfois les mêmes mots, même s’ils viennent dans un ordre différent et ne s’appliquent pas aux mêmes sujets. On pourra comparer entre autres Colossiens 2.16-17 et Hébreux 9.10-11 et 10.1. Celui qui voudrait analyser en détail les divers paragraphes de Colossiens et d’Éphésiens et les comparer avec la lettre aux Hébreux sera surpris des concordances. Mais le fait qu’on retrouve associés de part et d’autre plusieurs mots assez rares ne permet pas de certifier dans tous les cas que l’un a repris les termes de l’autre, car il y avait sûrement dès cette époque un vocabulaire chrétien qui se transmettait d’une communauté à l’autre. Les prophètes de l’Église, en particulier, développaient diverses expressions de la foi à partir des Écritures, et comme ils étaient souvent des itinérants, un langage commun se mettait en place un peu partout. Cela n’empêchait pas que quelques grands témoins, qu’il s’agisse de Paul, de Pierre ou de l’auteur de la présente lettre, jouent un rôle majeur dans la formulation théologique de la foi.


Source: Bible des peuples