Lecture d'un commentaire (3496)


Ex 24,1

Commentaire: Cette scène grandiose s’enracine, comme bien d’autres que nous rapporte l’Exode, dans l’expérience religieuse d’Israël au temps des Rois. Moïse va seul à la rencontre de Dieu, comme le grand prêtre lorsqu’il entrait seul dans le sanctuaire. L’autel de pierres brutes et les douze pierres dressées rappellent le sacrifice du Carmel (1Rois 18.30). Peut-être le paragraphe 24.9-11 doit-il être compris comme une version différente de l’alliance. Ce n’est pas le sacrifice célébré par le peuple sur son terrain propre qui est le plus important, mais le banquet sacré qui ordinairement concluait les sacrifices et qui, ici, a lieu près des sommets, sur le terrain de Dieu, dans le rayonnement de sa splendeur. Et, contrairement à ce que prescrivait la loi des prêtres (24.2), les anciens aussi sont montés et ils ont eu droit à tout. L’alliance Si le livre a gardé deux traditions différentes de la façon dont on avait célébré l’union désormais définitive de Dieu et du peuple libéré, c’est en partie parce que les mots ne sont pas venus immédiatement pour définir le lien qui s’était créé entre Dieu et Israël. Les textes bibliques qui nous parlent des alliances de Dieu avec Noé, Abraham, Moïse, ont tous été écrits ou révisés à la fin du temps des Rois ou après l’Exil, et c’est alors que le mot alliance s’est imposé, écartant ce qu’on avait pu écrire auparavant. Durant les siècles du royaume d’Israël, on s’était habitué à décrire les liens de Yahvé avec son peuple à l’image de ceux qui unissaient les petits rois et les grands souverains, les clans modestes et les peuples de poids. On s’est fixé sur le mot “alliance” et on l’a appliqué rétrospectivement à Noé, Abraham et Moïse. Les biblistes aiment montrer comment les scènes d’alliance de la Bible mettent en jeu les deux formes d’alliance qui existaient au Moyen Orient : d’une part le traité avec obligations mutuelles pour le protecteur et pour son protégé, d’autre part, le cadeau d’un prince à un serviteur fidèle auquel il ne demande que de persévérer dans sa loyauté. C’est de là que vient le sacrifice des versets 5-8, lequel rappelle aussi bien Genèse 15.9 que Jérémie 34.18. Mais bien avant que n’existent ces cérémonies d’alliance et de sacrifices, avant même qu’on n’ait choisi le mot “alliance”, déjà Israël célébrait une fête de Yahvé qui rappelait le lien unique du peuple avec le Dieu qui l’avait libéré et choisi : elle est mentionnée en Josué 8.30 et 24.1. On en a les échos dans les Psaume 50(49) et 81(80). Et cette relation se lit aux versets 9-11 sous sa forme la plus belle : ils ont vu Dieu et ils ont mangé à sa table. Cette figure du banquet sera reprise bien plus tard en Isaïe 25.6 où elle fait figure de nouveauté. Mais après le banquet et l’alliance, une troisième figure apparaîtra chez les prophètes, et ce sera celle du couple. Ici, le novateur est Osée. Les textes du Nouveau Testament reprendront les trois figures, mais la dernière, celle de l’union dans l’amour et la fidélité est celle qui exprimera plus habituellement l’expérience chrétienne. Voir à ce sujet le commentaire d’Osée*2.25.


Source: Bible des peuples