Lecture d'un commentaire (3155)


Mt 2,21

Commentaire: Il sera appelé Nazôréen. Matthieu joue sur ce mot qui évoque nezer ou rameau ( Isaïe 11.1) et nazir ( Nombres 6). Il y avait à l’époque des groupes religieux qui prêchaient et baptisaient, tout comme Jean Baptiste, et on les considérait comme des nazirs ; Jésus était à la fois nezer et nazir. Beaucoup se demandent ce que Jésus a fait entre l’âge de douze ans, quand on l’a remarqué dans le Temple ( Luc 2.41), et l’âge de trente ans ou plus, lorsqu’il commence son ministère public. Certains charlatans profitent du silence de l’Évangile pour imaginer Jésus en Inde apprenant la magie et l’art de faire des miracles auprès des fakirs, ou même mieux en visite auprès des extraterrestres ! Il est facile d’inventer n’importe quoi. Rappelons d’abord que l’évangile n’est pas une biographie de Jésus, un récit de sa vie de sa naissance à sa mort. Les évangiles de Marc et de Jean commencent avec le baptême de Jésus par Jean-Baptiste, qui marque le début de sa prédication. Plus tard, Matthieu et Luc ont voulu y ajouter comme une préface avec les récits de l’enfance pour nous aider à comprendre le secret de sa personne. Ensuite, lisons Matthieu 13.54-56. Lorsque les gens de Nazareth s’étonnent des miracles de Jésus, ils ne disent pas : “Il est resté longtemps à l’étranger, c’est sans doute là-bas qu’il a appris !” Ils se demandent plutôt : Qu’est-ce qui est arrivé au fils du charpentier ? Nous qui le connaissions depuis si longtemps, nous n’attendions pas cela. Jésus, le Nazaréen. Si l’on excepte les deux premiers chapitres de Matthieu et de Luc, les évangiles n’ont gardé de Jésus que ce dont les apôtres voulaient témoigner et qui leur semblait important pour connaître la personne et l’œuvre de Jésus. La façon dont il avait envisagé, accepté et souffert sa mort leur semblait beaucoup plus importante pour établir la foi que les détails qu’ils seraient allés chercher regardant sa jeunesse. Cela ne veut pas dire que ces années de Nazareth aient été moins importantes que le reste de la vie de Jésus. Il suffisait que le Fils de Dieu les ait vécues pour qu’elles aient une valeur d’éternité, puisque le salut de Dieu n’est autre que l’entrée de la communauté humaine, devenue une en Jésus, dans le mystère de l’Éternité Dieu. De fait, ces années de Nazareth ont fait de Jésus le prophète d’Israël. N’oublions pas qu’avant d’être le prophète et le sauveur du monde Jésus a été envoyé pour être le sauveur du peuple juif au temps où l’ancienne histoire était arrivée au terme voulu par Dieu. Les prophètes sont des hommes qui ont fait des expériences fortes et qui ont quelque chose à dire. Leurs paroles viennent d’eux-mêmes tout autant que de l’Esprit de Dieu. Jésus ne pouvait pas communiquer la parole de Dieu s’il n’avait pas, en tant qu’homme, une connaissance exceptionnelle du cœur humain. Les années passées à Nazareth n’ont pas été des années perdues. Jésus a fait sienne la culture de son peuple, vécu les événements qui touchaient sa nation ; il a fait l’expérience du travail manuel, des relations humaines, de la souffrance et de l’oppression (Jésus a sûrement vu près de Séphoris des nationalistes galiléens crucifiés). Dans le hameau de Nazareth Jésus a appris les générosités et la méchanceté du cœur humain. Il a dû en sortir bien souvent, ne serait-ce que pour chercher du travail. Séphoris, la capitale romaine de la Galilée n’était qu’à huit kilomètres à vol d’oiseau. Ce devait être le marché le plus proche, Jésus y a vu le monde de la ville, il y a appris les éléments de base du grec, nécessaires aussi bien pour acheter que pour traiter avec l’administration. Le Fils de Dieu ne s’est pas senti gêné, comme nous le serions nous-mêmes, dans une société rurale qui ne connaissait ni le savon, ni la fourchette, ni la salle d’eau : les conditionnements de la vie journalière lui semblaient tout aussi naturels qu’ils l’étaient pour son entourage. Jésus a fréquenté la synagogue, il a prié et chanté avec les hommes de la communauté, il a aimé la Loi. Mais il était pleinement libre et il pouvait apprécier les limites des personnes comme des institutions.


Source: Bible des peuples