Lecture d'un commentaire (2314)


Ct 1,1

Commentaire: INTRODUCTION AU CANTIQUE Le cantique est un poème ; il ne faudra pas d’abord chercher de la logique, mais nous laisser prendre par le texte, il nous ouvrira l’un des mondes de la Bible. Le Cantique réveille nos propres expériences, et toujours nous atteint au cœur, puisqu’il s’agit de l’Aimé et de l’Aimée. C’est un poème de la rencontre amoureuse. Mais l’auteur laisse cette rencontre se dérouler comme un rêve, afin d’en dévoiler le mystère : l’appel de l’amour vient d’ailleurs. La recherche, la rencontre, les fuites, ne sont enchanteresses et ne sont vraies que parce qu’en elles transparaît un mystère : un Autre nous attire. D’où le titre que le livre se donne à lui-même : Le Cantique des cantiques. En hébreu, c’est là une des formes du superlatif : le Chant par excellence, ou : Le Chant plus haut. Le Cantique, c’est l’intuition et la recherche de l’Unique au-delà de tous les voiles ; lui, d’ailleurs, est tout aussi fasciné par la recherche de celui ou celle qu’il a choisie, unique pour lui et irremplaçable. Cette découverte de Yahvé, le Dieu farouche, comme l’époux n’est pas totalement neuve dans la Bible ; les prophètes s’étaient appuyés sur leur expérience conjugale pour parler de l’alliance de Dieu avec son peuple ( Osée 1-2), plus encore ils avaient utilisé les mots de l’amour humain pour exprimer leur expérience d’une relation privilégiée avec Dieu, laquelle, un jour, serait offerte à tout Israël. À mesure qu’il laisse se dérouler le rêve amoureux, l’auteur du Cantique revit l’espérance du peuple choisi. L’Aimée de Dieu, c’est d’abord Israël avec sa terre, et l’auteur attend la venue de l’Unique comme roi-Messie de la communauté élue. Ceci nous explique la présence dans le Cantique de comparaisons qui sembleraient étranges s’il s’agissait de fiancés ordinaires, mais qui sont en fait des allusions au passé d’Israël, à son Temple et à sa terre. Il faut reconnaître que beaucoup de biblistes aujourd’hui, voyant les points de contact entre le Cantique et les chants d’amour du Moyen-Orient, pensent qu’il est de la même veine et que seulement dans un deuxième temps on y a vu une image de l’amour de Dieu pour son peuple. Cette hypothèse peut sembler plus raisonnable, mais ce n’est qu’une apparence : elle a le malheur de ne plus laisser que banalités ou incohérence partout où, justement, nous devinons que se trouvent les clés du poème. C’est alors qu’il faut revenir à ce qu’a vu toute la tradition : dans le Cantique comme chez les grands prophètes, mais avec d’autres mots, c’est l’expérience du Dieu-Amour qui a inspiré tout le rêve et attiré les images humaines. Le Cantique n’est pas un chant de l’amour humain qui s’est retrouvé dans la Bible après avoir reçu une interprétation religieuse : dès les origines la tradition juive y a vu le chant de l’amour divin. Et le fait que Dieu n’y soit pas nommé est intentionnel, car l’Unique, à la fois Amour et Amant, est bien loin du “Dieu” des religions humaines.


Source: Bible des peuples