Lecture d'un commentaire (19138)


1R 2,29

Commentaire: SALOMON PUNIT JOAB
À l'âge de douze ans (1), Salomon succède à son père David en tant que roi. Son vrai nom était Jedidiah, l'«ami de Dieu», mais il fut remplacé par le nom de Salomon en raison de la paix qui régnait dans tout le royaume pendant son règne. Il portait en outre trois autres noms: Ben, Jakeh et Ithiel. On l'appelait Ben, parce qu'il était le constructeur du Temple ; Jakeh, parce qu'il était le maître du monde entier ; et Ithiel, parce que Dieu était avec lui. (2)
La rébellion qu'Adonias avait l'intention de mener contre le futur roi a été étouffée du vivant de David par l'onction publique de Salomon. À cette occasion, Salomon est monté sur une mule remarquable, remarquable parce qu'elle n'était pas le produit d'un croisement, mais d'un acte spécial de création. (3)
Dès son accession au trône, Salomon se mit à exécuter les instructions que son père lui avait données sur son lit de mort. La première d'entre elles est le châtiment de Joab. (4)
Malgré toutes ses excellentes qualités, qui lui permettaient d'être non seulement le premier général de David, mais aussi le président de l'Académie (5), Joab avait commis de grands crimes qu'il fallait expier. Outre le meurtre d'Abner (6) et d'Amasa dont il s'était rendu coupable, il fomenta contre David lui-même. Les généraux de l'armée le soupçonnaient d'avoir fait écarter Urie le Hittite à des fins personnelles, mais il leur montra la lettre de David condamnant Urie. David aurait pu pardonner à Joab, mais il voulait qu'il expie ses péchés en ce monde, afin d'être exempté de tout châtiment dans le monde à venir. (7)
Lorsque Joab comprend que Salomon a l'intention de le faire exécuter, il cherche la protection du Temple. Il savait bien qu'il ne pourrait pas sauver sa vie de cette manière, car le bras de la justice s'étend au-delà des portes du sanctuaire, jusqu'à l'autel de Dieu. Ce qu'il souhaitait, c'était être jugé régulièrement et ne pas être mis à mort sur ordre du roi. Dans ce dernier cas, il aurait perdu la vie et la fortune, et il désirait laisser à ses enfants une bonne subsistance. Salomon lui fit savoir qu'il n'avait pas l'intention de confisquer ses biens. (8)
Bien que convaincu de la culpabilité de Joab, Salomon lui accorda néanmoins le privilège de la défense. Le roi l'interrogea: «Pourquoi as-tu tué Abner ?»
Joab: «J'étais le vengeur de mon frère Asaël, qu'Abner avait tué.
Salomon: «C'est Asaël qui a cherché à tuer Abner, et Abner a agi en état de légitime défense.
Joab: «Abner aurait pu mettre Asaël hors d'état de nuire sans en arriver à des extrémités.
Salomon: «Ce qu'Abner n'a pas pu faire».
Joab: «Abner a visé la cinquième côte d'Asaël, et tu dis qu'il n'a pas réussi à le blesser légèrement ?
Salomon: «Très bien, nous laisserons tomber l'affaire d'Abner. Mais pourquoi as-tu tué Amasa ?»
Joab: «Il s'est montré rebelle à l'égard du roi David. Il n'a pas exécuté son ordre de rassembler une armée dans les trois jours ; pour cette faute, il a mérité de subir la peine de mort.»
Salomon: «Amasa n'a pas obéi à l'ordre du roi, car nos sages lui avaient enseigné que même les injonctions d'un roi peuvent être ignorées si elles impliquent la négligence de l'étude de la Torah, ce qui était le cas de l'ordre donné à Amasa. Et en effet, poursuit Salomon, ce n'est pas Amasa mais toi-même qui t'es rebellé contre le roi, car tu étais sur le point de rejoindre Absalom, et si tu t'es abstenu, c'est par crainte des troupes de David aux poings solides.» (9)
Joab, voyant que la mort était inévitable, dit à Benaja, chargé d'exécuter l'ordre du roi: «Dis à Salomon qu'il ne peut pas m'infliger deux châtiments. S'il veut m'ôter la vie, il doit lever la malédiction prononcée par David contre moi et ma descendance à cause du meurtre d'Abner. Sinon, il ne peut pas me mettre à mort». Salomon se rend compte de la justesse de la demande. En exécutant Joab, il transfère la malédiction de David à sa propre postérité: Roboam, son fils, serait atteint d'un ulcère ; Ozias souffrirait de la lèpre ; Asa devrait s'appuyer sur un bâton pour Mcher ; le pieux Josias tomberait par l'épée de Pharaon, et Jéconias vivrait de la charité. Les imprécations de David s'accomplirent donc sur sa propre famille et non sur celle de Joab. (10)


Source: Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg