Lecture d'un commentaire (19112)


1S 1,1

Commentaire: ELKANAH ET HANNAH
La période des Juges est liée à la période du Royaume par le prophète Samuel, qui oint Saül et David comme rois. Non seulement Samuel était lui-même prophète, mais ses ancêtres l'étaient aussi (1), et ses parents, Elkana et Anne, avaient tous deux le don de prophétie (2). (2) Outre ce don, Elkana possédait des vertus extraordinaires. Il fut un second Abraham, le seul homme pieux de sa génération, qui sauva le monde de la destruction lorsque Dieu, irrité par l'idolâtrie de Michée, était sur le point de l'anéantir complètement. (3) Son principal mérite est d'avoir incité le peuple, par son exemple, à se rendre en pèlerinage à Silo, centre spirituel de la nation. Accompagné de toute sa famille, y compris ses proches, il avait l'habitude de faire les trois pèlerinages prescrits chaque année, et bien qu'il fût un homme de condition modeste, (4) sa suite était équipée avec une grande magnificence. Dans toutes les villes qu'il traversait, le cortège causait de l'agitation. Les spectateurs s'enquéraient toujours de la raison de ce spectacle rare, et Elkana leur répondait: «Nous allons à la maison de l'Éternel à Silo, car c'est de là que vient la loi. Pourquoi ne vous joindriez-vous pas à nous ?» Ces paroles douces et persuasives ne manquèrent pas d'effet. La première année, cinq familles entreprirent le pèlerinage, l'année suivante dix, et ainsi de suite jusqu'à ce que toute la ville suive son exemple. Chaque année, Elkana choisissait un nouveau chemin. C'est ainsi qu'il se rendit dans de nombreuses villes, dont les habitants furent amenés à accomplir un acte de piété. (5)
Malgré sa crainte de Dieu, la vie domestique d'Elkana n'est pas parfaitement heureuse. Il était marié depuis dix ans, et son union avec Anne n'avait pas été bénie par une descendance. (6) L'amour qu'il portait à sa femme le dédommageait de sa stérilité, mais Anne elle-même insistait pour qu'il prenne une seconde femme. Peninnah saisit toutes les occasions de contrarier Hannah. Le Mtn, elle saluait Hannah avec dérision: « (7) Ces railleries devaient permettre à Hannah de garder à l'esprit qu'elle n'avait pas d'enfant. Les intentions de Peninnah étaient peut-être louables: elle voulait peut-être amener Hannah à prier Dieu pour avoir des enfants. (8) Quelle que soit la manière dont elle a été forcée de le faire, la requête d'Anne pour un fils est fervente et pieuse. Elle implore Dieu: «Seigneur du monde ! As-tu créé quelque chose en vain ? Tu as destiné nos yeux à la vue, nos oreilles à l'ouïe, notre bouche à la parole, notre nez à l'odorat, nos mains au travail. N'as-tu pas créé ces seins au-dessus de mon cœur pour qu'ils allaitent un enfant ? (9) Accorde-moi un fils, afin qu'il y puise sa nourriture. Seigneur, tu règnes sur tous les êtres, les mortels et les célestes. Les êtres célestes ne mangent ni ne boivent, ils ne se propagent pas, ils ne meurent pas, mais ils vivent éternellement. L'homme mortel mange, boit, se propage et meurt. Si je fais partie des êtres célestes, je vivrai éternellement. Mais si j'appartiens à l'humanité mortelle, que je fasse ma part dans l'établissement de la race». (10)
Le grand prêtre Eli, qui avait d'abord mal interprété la longue prière d'Anne, la congédia en lui donnant la bénédiction: «Que le fils qui te naîtra acquière une grande connaissance de la loi.» (11) Anne quitte le sanctuaire et, aussitôt, son visage marqué par le chagrin change. Elle sent, sans l'ombre d'un doute, que la bénédiction d'Éli s'accomplira. (12)


Source: Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg