Lecture d'un commentaire (19058)


Nb 22,41

Commentaire: LES SACRIFICES DE BALAAM REFUSÉS
Le lendemain matin, Balak prit Balaam et le conduisit sur les hauts lieux de Baal. Balak était un magicien et un devin encore plus grand que Balaam, qui s'était laissé conduire par lui comme un aveugle. Il le conduisit à cet endroit parce que, grâce à ses connaissances magiques, il savait qu'Israël allait subir un grand malheur sur les hauteurs de Baalpeor, et il pensait que c'était la malédiction de Balaam qui allait provoquer ce désastre sur eux. La relation entre ces deux hommes ressemblait à celle de deux hommes dont l'un a un couteau à la main, mais ne sait pas quelle partie du corps frapper pour l'abattre, et dont l'autre connaît la partie du corps, mais n'a pas de couteau. Balak connaissait l'endroit où le malheur attendait Israël, mais ne savait pas comment l'amener, tandis que Balaam savait comment le mal est conjuré, mais ne connaissait pas les lieux du malheur vers lesquels Balak devait le conduire. La supériorité de Balaam sur Balak et les autres magiciens résidait dans le fait qu'il savait déterminer avec précision le moment de la colère de Dieu, et c'est pour cette raison que sa malédiction était toujours efficace, car il savait maudire à l'instant même de la colère de Dieu. Il est vrai que Dieu se met en colère pendant un instant chaque jour, à savoir à la troisième heure du jour, lorsque les rois avec des couronnes sur la tête adorent le soleil, mais cet instant est d'une durée infiniment courte. Quatre-vingt-cinq mille quatre-vingt-huit de ces instants font une heure, de sorte qu'aucun mortel, à l'exception de Balaam, n'a jamais pu fixer ce moment, bien que ce point de temps ait ses manifestations extérieures dans la nature, car pendant qu'il dure, la crête du coq devient absolument blanche, sans même la plus petite bande de rouge. Mais l'amour de Dieu pour Israël est si grand que, pendant que Balaam se préparait à maudire Israël, il ne se mit pas du tout en colère, de sorte que Balaam attendit en vain le moment de la colère. (758)
Balaam tente alors d'obtenir le consentement de Dieu à la malédiction d'Israël par des sacrifices, et demande à Balak d'ériger sept autels sur le haut lieu de Baal, correspondant aux sept autels qui, depuis Adam, ont été érigés par sept hommes pieux, à savoir: Adam, Abel, Noé, Abraham, Isaac, Jacob et Moïse. Une fois les autels érigés, il dit à Dieu: «Pourquoi as-tu favorisé ce peuple, si ce n'est à cause des sacrifices qu'il t'a offerts ? Ne valait-il pas mieux que tu sois adoré par soixante-dix nations que par une seule ?» Mais l'Esprit Saint répondit: «Mieux vaut un morceau sec et la tranquillité qu'il procure, qu'une maison remplie de sacrifices et de querelles. Une offrande de farine sèche M'est plus chère que toutes ces nombreuses offrandes de chair par lesquelles tu t'efforces d'exciter des querelles entre Moi et Israël.»
C'est alors que le sort de Balaam fut décidé, car par sa conduite il se mit en opposition directe avec Dieu, et c'est pourquoi sa destruction fut décrétée, (759) et à partir de ce moment le saint esprit de prophétie le quitta, et il ne fut plus qu'un magicien. Cependant, pour l'amour d'Israël, Dieu lui accorda l'honneur de sa révélation, mais il le fit à contrecœur, comme on répugne à toucher une chose impure. C'est pourquoi il n'a pas permis à Balaam de venir à lui, mais il lui est apparu. La différence de traitement entre Balaam et Moïse lors de la révélation est évidente, car alors que ce dernier se rendait au sanctuaire pour entendre les paroles de Dieu, le premier recevait la révélation de Dieu en n'importe quel lieu. Cela caractérise l'attitude de Dieu à leur égard. Deux hommes frappèrent un jour à la porte d'un magnat, l'un étant un ami qui avait une requête à faire, et l'autre un mendiant lépreux. Le magnat dit: «Laissez entrer mon ami, mais j'enverrai l'aumône du mendiant à la porte, afin qu'il n'entre pas et ne souille pas mon palais». Dieu appela Moïse auprès de lui, tandis qu'il ne voulut pas que Balaam vînt à lui, et qu'il s'y installa lui-même. (760)
Il trouva Balaam près des sept autels qu'il avait dressés, et lui dit: «Que fais-tu ici ?» Balaam répondit: «Je t'ai dressé autant d'autels que les trois pères d'Israël, et j'y ai offert des taureaux et des béliers». Mais Dieu lui dit: «Mieux vaut un repas d'herbes où il y a de l'amour, qu'un bœuf en rut et la haine qui l'accompagne. Le repas de pains sans levain et d'herbes que les Israélites ont pris en Égypte M'est plus agréable que les taureaux que tu offres par inimitié. Tu te trompes si tu crois que j'accepte des offrandes des nations du monde, car j'ai fait le vœu de n'en accepter que d'Israël. Dieu le livra alors à un ange qui entra et s'installa dans sa gorge, et ne permit pas à Balaam de parler quand il voulait maudire Israël. (762)


Source: Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg