Lecture d'un commentaire (18905)


Jb 1,3

Commentaire: LA RICHESSE ET LES BIENFAITS DE JOB
On demanda un jour à Job ce qu'il considérait comme l'affliction la plus grave qui pût le frapper, et il répondit: «La joie de mes ennemis dans mon malheur» (7) ; et quand Dieu lui demanda, après les accusations de Satan, ce qu'il préférait, la pauvreté ou la souffrance physique, il choisit la douleur, en disant: «Seigneur du monde entier, châtie mon corps par des souffrances de toutes sortes, mais préserve-moi seulement de la pauvreté» (8) La pauvreté semblait le plus grand fléau, car avant ses épreuves il avait occupé une position brillante en raison de ses immenses richesses. Dieu lui accorda gracieusement cet avant-goût des temps messianiques. La moisson suivit de près le labourage de son champ ; à peine les semences furent-elles jetées dans les sillons qu'elles germèrent, poussèrent et mûrirent. Il avait le même succès avec son bétail. Ses moutons tuaient les loups, mais n'étaient eux-mêmes jamais blessés par les bêtes sauvages (9) ; il n'avait pas moins de cent trente mille moutons, et il lui fallait huit cents chiens pour les garder, sans compter les deux cents chiens nécessaires pour assurer la sécurité de sa maison. En outre, ses troupeaux se composaient de trois cent quarante mille ânes et de trois mille cinq cents paires de bœufs. Tous ces biens n'étaient pas utilisés pour des plaisirs personnels, mais pour le bien des pauvres et des nécessiteux, qu'il habillait, nourrissait et pourvoyait de tout ce qui était nécessaire. Pour ce faire, il devait même employer des navires qui transportaient les provisions dans toutes les villes et les lieux d'habitation des indigents. Sa maison était pourvue de portes sur les quatre côtés, afin que les pauvres et les voyageurs puissent y entrer, quelle que soit la direction par laquelle ils s'approchaient. En tout temps, il y avait dans sa maison trente tables chargées de mets, et douze en outre pour les veuves seulement, de sorte que tous ceux qui venaient trouvaient ce qu'ils désiraient. La considération de Job pour les pauvres était si délicate qu'il avait des serviteurs pour s'occuper d'eux en permanence. Ses hôtes, séduits par sa charité, s'offraient souvent comme serviteurs pour s'occuper des pauvres dans sa maison, mais Job insistait toujours pour les payer pour leurs services. Si on lui demandait de prêter de l'argent à des fins commerciales et que l'emprunteur promettait de donner une partie de ses bénéfices aux pauvres, il n'exigeait pas d'autre garantie qu'une simple signature. Et si, par malheur, le débiteur n'était pas en mesure de s'acquitter de son obligation, Job lui rendait le billet ou le mettait en pièces en sa présence.
Il ne s'est pas contenté de répondre aux besoins Mtriels de ceux qui s'adressaient à lui. Il s'efforçait également de leur transmettre la connaissance de Dieu. Après le repas, il avait l'habitude de faire jouer de la musique sur des instruments, puis il invitait les personnes présentes à se joindre à lui dans des chants de louange à Dieu. En de telles occasions, il n'hésitait pas à jouer lui-même de la cithare pendant que les musiciens se reposaient (10).
Job s'est particulièrement préoccupé du sort des veuves et des orphelins. Il avait l'habitude de rendre visite aux malades, qu'ils soient riches ou pauvres, et lorsque cela s'avérait nécessaire, il se faisait accompagner d'un médecin. Si le cas s'avérait désespéré, il soutenait la famille éprouvée en lui prodiguant conseils et consolations. Lorsque la femme du malade incurable commençait à s'affliger et à pleurer, il l'encourageait par des paroles comme celles-ci: «Aie toujours confiance dans la grâce et la bonté de Dieu. Il ne t'a pas abandonnée jusqu'à présent et ne t'abandonnera pas non plus à l'avenir. Ton mari retrouvera la santé et pourra subvenir aux besoins de sa famille comme auparavant. Mais si - ce que Dieu peut empêcher - ton mari venait à mourir, je prends le Ciel à témoin que je pourvoirai à ta subsistance et à celle de tes enfants.» Après avoir ainsi parlé, il faisait venir un notaire et lui demandait de rédiger un document qu'il signait en présence de témoins, s'engageant à prendre soin de la famille si elle était privée de son chef. Il s'attirait ainsi la bénédiction du malade et la reconnaissance de l'épouse éplorée (11).
Parfois, en cas de nécessité, Job pouvait aussi se montrer sévère, surtout lorsqu'il s'agissait d'aider un pauvre à obtenir son dû. Si l'une des parties à un procès intenté devant son tribunal était connue pour être un homme violent, il s'entourait de son armée et lui inspirait de la crainte, de sorte que le coupable ne pouvait que se montrer favorable à sa décision (12).
Il s'efforçait d'inculquer à ses enfants sa bienveillance en les habituant à s'occuper des pauvres. Le lendemain d'une fête, il sacrifiait généreusement à Dieu et, avec les morceaux de l'autel, ses offrandes étaient réparties entre les nécessiteux. Il disait: «Prenez et servez-vous, et priez pour mes enfants. Il se peut qu'ils aient péché et qu'ils aient renoncé à Dieu en disant, dans la présomption de leur cœur: «Nous sommes les enfants de cet homme riche. Toutes ces choses nous appartiennent. Pourquoi serions-nous les serviteurs des pauvres ?» «.


Source: Les légendes des Juifs - Louis Ginzberg