Lecture d'un commentaire (17129)


Jn 15,12

Commentaire: Quelle admirable condescendance ! comme on ne peut être bon serviteur si l'on n'accomplit les préceptes de son maître, il veut que le caractère spécial des bons serviteurs, soit aussi le signe distinctif de ses amis. Le bon serviteur peut donc à la fois être serviteur et ami. Mais comment comprendre que le bon serviteur puisse réunir à la fois les deux titres de serviteur et d'ami, le Sauveur l'explique lui-même: «Je ne vous appellerai plus serviteur, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître». Est-ce à dire que nous cesserons d'être serviteurs, parce que nous serons de bons serviteurs? Est-ce qu'un maître ne confie pas aussi sus secrets à un serviteur, dont il a mis la fidélité à l'épreuve? Je réponds qu'il y a deux sortes de servitudes, comme il y a deux sortes de craintes. Il y a la crainte que la charité parfaite bannit complètement du coeur ( 1Jn 4,18 ); et cette crainte entraîne avec el servitude qu'il faut mettre dehors avec crainte; et il y a une autre crainte chaste et pure, cel qui demeure éternelment ( Ps 18) Notre-Seigneur avait donc en vue ceux qui servent sous impression de première servitude, lorsqu'il dit: «Je ne vous appelrai plus serviteurs, parce que serviteur ne sait pas», etc. Il ne veut point parr de ce serviteur animé d'une crainte chaste, et à qui son maître dit: «Courage, bon serviteur, entrez dans gloire de votre Seigneur;» ( Mt 24) mais du serviteur qui agit par ce sentiment de crainte que amour parfait chasse du coeur, et dont il est dit: « serviteur ne demeure pas toujours dans maison, mais fils y demeure éternelment». Puisque donc Dieu nous a donné pouvoir d'être ses enfants ( Jn 1), ne soyons plus serviteurs, soyons des enfants, de sorte que par une admirable transformation, nous soyons serviteurs sans être serviteurs; or, nous savons que c'est le Seigneur qui produit ce changement ineffable, tandis que le serviteur qui ne sait pas ce que fait son maître, l'ignore. Lorsqu'il fait quelque bien, il s'élève comme s'il en était l'unique auteur, et se glorifie en lui-même, plutôt que de renvoyer toute la gloire à son maître.


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)