Lecture d'un commentaire (16960)


Jn 13,36

Commentaire: C'est-à-dire, vous ferez pour moi ce que je n'ai pas encore fait pour vous? Vous pouvez me precéder, vous qui n'êtes pas capable de me suivre? Pourquoi tant de présomption? Apprenez donc ce que vous êtes: «En vérité, en vérité, je vous le dis, le coq ne chantera pas que vous ne m'ayez renié trois fois», vous qui promettez de mourir pour moi? vous renierez trois fois celui qui est votre vie. Pierre voyait bien l'étendue du désir de son âme, mais il ne voyait pas sa faiblesse, malade qu'il était, il vantait bien haut l'ardeur de sa volonté, mais le Médecin connaissait son infirmité. Peut-on admett re, avec, quelques-uns qui, par une condescendance coupable, veulent excuser Pierre, que cet apôtre n'a point précisément renié le Christ, parce qu'à la question que lui fit la servante, il répondit qu'il ne connaissait pas cet homme, comme les autres évangélistes le disent expressément? Comme si renier Jésus en tant qu'homme ne soit pas le renier comme Christ, et le renier dans ce qu'il a daigné se faire pour notre amour et pour nous sauver de la mort, nous ses créatures. Comment est-il devenu la tête de l'Eglise si ce n'est par son humanité? Comment donc peut-on faire partie du corps de Jésus-Christ, en reniant Jésus-Christ comme homme? Mais pourquoi nous arrêter davantage à cette difficulté? Notre-Seigneur ne dit point: Le coq ne chantera pas que vous n'ayez renié l'homme où le Fils de l'homme; mais: «Le coq ne chantera pas que vous ne m'ayez renié». Que veut dire ici l'expression moi, si ce n'est ce que Jésus-Christ était alors? donc tout ce que Pierre a renié dans le Christ, c'est Jésus-Christ lui-même qu'il a renié. En douter, ce serait un crime. Jésus-Christ l'a déclaré, il a prédit les deux choses; il est donc certain que Pierre a renié Jésus-Christ. N'allons pas accuser Jésus-Christ, en voulant défendre Pierre. Pierre a reconnu pleinement son péché, et l'abondance des larmes qu'il a versées a témoigné de la grandeur du crime qu'il a commis. Si nous parlons de la sorte, ce n'est point pour le plaisir d'accuser le chef des Apôtres, mais la considération de sa chute nous apprend combien l'homme doit se défier de ses propres forces.


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)