Lecture d'un commentaire (1583)
Dt 4,5
Commentaire: LA SAGESSE DE LA BIBLE _Sagesse de la Bible (la) Cette mise en valeur de la Sagesse est à elle seule une réorientation religieuse. Le témoignage que donnera Israël au milieu des nations ne sera pas d’abord la splendeur de son culte, mais la mise en pratique d’une façon de vivre que Dieu lui a enseignée. Israël n’aura pas besoin d’images pour trouver Dieu proche et secourable, il lui suffira d’invoquer Dieu dont lui seul connaît le nom. Quelle grande nation ! Elle seule a la sagesse et l’intelligence. Ce livre est contemporain du chapitre 20 de l’Exode et de nos Dix Commandements. Il a été écrit huit siècles avant le Christ et déjà nous y lisons cette certitude : Dieu nous a donné une sagesse qui n’a pas été communiquée aux autres peuples. On peut sourire à distance, et penser que, du clocher de son village, l’écrivain sacré ne voyait qu’un petit coin du monde et ignorait volontiers, aussi bien les millénaires de culture égyptienne et mésopotamienne qui l’avaient précédé, que les autres grandes cultures et religions de l’Asie lointaine. Et pourtant… L’affirmation de Yahvé, Dieu unique, qu’on ne saurait représenter ; le Dieu Juste qui demande la fidélité intérieure et la pratique de la justice par-dessus toute autre forme de culte ; l’obligation rigoureuse du sabbat comme le moyen de préserver la liberté et la dignité des personnes ; la protection de la vie humaine et le respect de l’étranger, souvent un israélite installé sur le territoire d’une tribu qui n’est pas la sienne ; le refus de toute licence sexuelle, c’étaient là des lois étonnantes et dont le bénéfice ne s’apprécierait vraiment qu’à la longue, quand les cultures voisines auraient disparu l’une après l’autre. Mais si l’orgueil d’être les détenteurs d’une sagesse supérieure pouvait faire naître en Israël le sentiment qu’ils étaient des privilégiés, on peut aussi renverser l’ordre des termes : la certitude d’avoir été appelé par Dieu pour un destin unique était l’un des piliers de la sagesse d’Israël. Tout l’édifice de la Loi se serait écroulé si l’on n’avait pas cru à une alliance entre Yahvé et Israël (4.13 ; 4.20). Le Deutéronome est fortement inspiré par la prédication des premiers prophètes, à l’école d’Élie, et il va nous redire de mille façons qu’il n’y a de salut pour Israël que dans la fidélité à sa vocation. Nous avons là l’un des facteurs essentiels de l’identité du peuple de la Bible. Aujourd’hui il nous faut certainement ouvrir les yeux sur les religions du monde et voir comment à travers elles Dieu a fait œuvre de salut dans les diverses cultures. Il est fort utile de savoir que ni la religion d’Israël, ni le christianisme ne sont des commencements absolus, mais que leurs doctrines ont des antécédents dans d’autres religions. Cependant, quand on aura éclairé tous ces rapports et qu’on aura tenté d’élaborer une “généalogie des religions”, on n’aura encore rien dit sur ce qui est l’essentiel de la révélation biblique : elle s’adresse au seul peuple que Dieu se soit choisi pour se faire connaître de lui à visage découvert. Partout ailleurs les religions pourront proposer des lois divines, on parlera de commandements, de recherche de l’Absolu, mais nulle part on ne mettra au cœur de la recherche, ou du service, ou de l’obéissance, une connaissance de Dieu à visage découvert (4.7 ; 4.35 ; Colossiens 2.8-10). Le Deutéronome dira : “Vous n’avez rien vu, vous avez seulement entendu la Parole de Dieu” (4.12 ; 5.24). Mais dans ce “vous n’avez pas vu” il n’y a que le refus de toute image et l’appel à la foi : on ne nie pas que Dieu se soit manifesté. Le discours que l’auteur attribue à Yahvé est constamment celui d’un Dieu qui se révèle à ceux qu’il aime et qui l’aiment (4.37 ; 7.8 ; 6.4). Passons au Nouveau Testament, et nous aurons le Discours après la Cène de Jean 14—17.
Source: Bible des peuples