Lecture d'un commentaire (13897)


Lc 15,25

Commentaire: Mais que veulent dire ces paroles: «Et tout ce que j'ai est à vous ?» Est-ce que ce n'est pas aussi à son frère? Sans doute, mais les fils arrivés à la perfection, et comme entrés déjà dans l'immortalité, possèdent toutes choses, comme si chacune d'elles était à tous, et comme si toutes étaient à chacun d'eux. La cupidité rend le coeur étroit et ne peut rien posséder qu'avec égoïsme; la charité, au contraire, agrandit et dilate le coeur. Mais comment, tout ce qui est au père peut-il être au fils? Est-ce que Dieu a aussi donné à ce fils la possession des anges? Si par possession vous entendez que le possesseur soit le propriétaire et le maître, il ne lui a pas tout donné, car nous ne serons pas un jour les maîtres des anges, mais nous partagerons leur bonheur. Mais si vous entendez le mot possession dans le sens que nous disons, que les âmes possèdent la vérité, je ne vois pas pourquoi nous ne prendrions pas cette expression à la lettre, car en parlant ainsi, nous ne voulons pas dire que les âmes soient maîtresses de la vérité; si enfin le sens propre du mot possession ne se prête pas à cette interprétation, nous y renonçons volontiers, car le père ne dit pas: Vous possédez touts mais: «Tout ce qui est à moi est à vous», mais non pas comme si vous en étiez le maître. En effet, ce que nous avons d'argent peut être destiné, soit à l'entretien, soit à l'ornement de notre famille ou à quelque autre usage semblable. Car puisque ce fils peut dire, dans un sens vrai, que son père est à lui, pour. quoi ne pourrait-il pas le dire de ce que possède son père? Il faut seulement l'entendre de différentes manières; ainsi lorsque nous serons parvenus à la béatitude des cieux, les choses supérieures seront à nous pour les contempler, les êtres qui nous sont égaux pour partager leur sort, les créatures inférieures pour les dominer. Le frère aîné peut donc se livrer à la joie en toute sécurité.


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)