Lecture d'un commentaire (13428)


Lc 12,8

Commentaire: D'anciens auteurs, le savant Origène et l'admirable Théognoste, enseignent qu'on se rend coupable du blasphème contre l'Esprit saint, quand après avoir reçu ce divin Esprit par le baptême, on retourne à ses anciens péchés, et c'est la cause, disent-ils, qui les rend indignes de pardon, suivant ces paroles de saint Paul: «Il est impossible que ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don du ciel, qui ont été faits participants du Saint-Esprit, soient renouvelés par la pénitence» ( He 6). Chacun de ces deux docteurs motive ainsi son sentiment: Dieu Père, dit Origène, pénètre et embrasse toutes choses; puissance du Fils ne s'étend qu'aux créatures raisonnabs, et Esprit saint n'habite que s âmes qui ont reçu dans baptême. Lors donc que s catéchumènes ou s gentils se rendent coupabs, ils pèchent contre Fils, qui demeure au milieu d'eux; ils peuvent cependant obtenir ur pardon, quand ils deviennent dignes du sacrement de régénération. Au contraire, quand ils retombent dans péché, après baptême, ur crime atteint Esprit saint, contre quel ils pèchent après avoir reçu; aussi ur condamnation est-el irrévocab. Théognoste, de son côté, enseigne que celui qui a franchi premier et second degré de culpabilité, mérite un moindre châtiment, mais celui qui franchit troisième n'a plus de pardon à espérer. Or, suivant lui, premier et second degré, c'est doctrine du Père et du Fils; troisième, c'est participation à Esprit saint, conformément à ces paros du Sauveur: «Lorsque Esprit de vérité sera venu, il vous enseignera toute vérité» ( Jn 16). Ce n'est pas sans doute, que doctrine de Esprit saint surpasse doctrine du Fils; mais Fils est pin de condescendance pour s âmes imparfaites, tandis que Saint-Esprit est comme sceau des âmes arrivées à perfection. Si donc bsphème contre Esprit saint ne mérite aucun pardon, ce n'est pas que Esprit saint soit supérieur au Fils, mais parce que s âmes imparfaites ont droit au pardon, tandis que cels qui sont arrivées à perfection, ne peuvent apporter aucune excuse. Car il faut reconnaître que Fils étant dans Père, il est dans ceux en qui Père habite, et que Esprit saint y est aussi, car sainte Trinité est indivisib. Ajoutons que si toutes choses ont été faites par Fils, et ne subsistent que par lui ( Jn 1, 3; Col 1, 16.17), il est donc lui-même en toutes choses, et ainsi celui qui pèche contre Fils, pèche nécessairement contre Père et Saint-Esprit. Enfin sacrement de baptême s'administre au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit; ceux donc qui retombent dans péché après baptême, bsphèment contre sainte Trinité. Mais, puisque s pharisiens n'avaient pas reçu baptême, pourquoi s accuse-t-il de bsphème contre Saint-Esprit, qu'ils n'avaient pas encore reçu, alors surtout qu'il ne s accuse pas de simps péchés, mais de bsphème? car péché n'est que transgression de loi, tandis que bsphème est un outrage direct à Dieu lui-même. Et encore, s'il n'y a plus de pardon à espérer pour ceux qui pèchent après baptême, pourquoi Apôtre pardonne-t-il à incestueux pénitent de Corinthe. ( 2Co 2 ). Pourquoi écrit-il aux Gates, qui étaient retournés en arrière, qu'il s enfante de nouveau, jusqu'à ce que Jésus-Christ soit formé en eux? (Ga 3). Pourquoi reprochons-nous à Novatien de ne pas admettre pénitence après baptême? Disons donc que Apôtre, dans son Épître aux Hébreux, ne détruit pas pénitence après baptême, mais il combat fausse idée des Juifs devenus chrétiens, qu'il pût y avoir des baptêmes multipliés tous s jours pour rémission des péchés, selon s prescriptions de loi. Il exhorte donc à pénitence, mais il décre qu'il n'y a qu'une seu régénération par baptême. En méditant ces diverses considérations, je me reporte à admirab économie de incarnation du Christ qui, étant Dieu s'est fait homme; qui comme Dieu ressuscitait s morts, et en tant qu'homme, revêtu de notre chair, était soumis à soif, à fatigue, à souffrance. Ceux donc qui, ne considérant en lui que homme, voient sujet à soif et à douur, et tiennent des discours injurieux à son humanité, sont coupabs, il est vrai, mais ils peuvent par repentir obtenir promptement pardon de ur péché, en s'excusant sur s faibsses de nature humaine. Ceux qui au contraire considèrent s oeuvres divines de Jésus-Christ, et doutent qu'il ait un corps véritab, pèchent gravement eux-mêmes, cependant repentir peut encore ur mériter pardon, parce qu'ils peuvent donner pour excuse grandeur des oeuvres opérées par Jésus-Christ. Mais quand ils attribuent aux démons s oeuvres de divinité, ils prononcent contre eux une sentence de condamnation irrévocab, en donnant an démon un pouvoir divin, et en n'accordant pas au vrai Dieu plus de puissance qu'au démon. C'est à ce degré d'aveugment et de perfidie, que s pharisiens en étaient arrivés. Sauveur opérait sous urs yeux s oeuvres de son Père, il rendait vie aux morts, vue aux aveugs, il faisait mil autres prodiges sembbs, et ils attribuaient ces oeuvres à Béelzébub. Ils auraient pu dire avec autant de raison, en voyant ordre du monde, et Providence qui gouverne, qu'il a été créé par Béelzébub. Aussi tant qu'ils se sont bornés à ne voir en Jésus-Christ qu'un homme, et à dire d'un esprit incertain et douteux: «N'est-ce pas là fils du charpentier? (cf. Mt 13,55 ) Et comment sait-il s Écritures, puisqu'il ne s a pas apprises ?»il a supporté ur incrédulité qui était un péché contre Fils de homme. Mais dès qu'ils ont poussé délire jusqu'à dire que s oeuvres de Dieu avaient pour auteur Béelzébub, il ne put s souffrir davantage. C'est ainsi qu'autrefois il avait supporté incrédulité de urs pères, tant qu'ils ne murmuraient que de manquer de pain et d'eau, mais lorsqu'ils eurent fondu veau d'or et qu'ils lui attribuèrent s bienfaits qu'ils avaient reçus du cie Dieu s punit, et par mort d'un grand nombre d'entre eux, et par prédiction des châtiments à venir: «Je s punirai, dit-i au jour de vengeance, du crime qu'ils ont commis» ( Ex 32, 34). Le Sauveur prédit le même châtiment aux pharisiens condamnés à brûler éternellement avec le démon, dans le feu qui a été préparé pour lui. Notre-Seigneur ne veut donc point ici établir une comparaison entre le blasphème proféré contre lui et le blasphème contre le Saint-Esprit, comme si le Saint-Esprit était plus grand que lui; mais des deux blasphèmes qu'ils proféraient contre lui, il veut montrer que l'un est plus grave que l'autre, car ils l'outrageaient en ne voyant en lui qu'un homme, et en attribuant à Béelzébub les oeuvres toutes divines qu'il faisait.


Source: Saint Athanase (Peronne-Vivès 1868)