Lecture d'un commentaire (12591)


Lc 7,36

Commentaire: En voyant ce spectacle, le pharisien n'a que du mépris pour cette femme, et il fait tomber ses reproches non seulement sur elle, qui ose venir trouver Jésus, mais sur le Seigneur qui l'accueille avec bonté: «Ce que voyant le pharisien qui l'avait invité, il dit en lui-même: Si cet homme était prophète, il saurait qui est celle qui le touche, et que c'est une pécheresse». Voilà ce pharisien avec son orgueil trop véritable et sa fausse justice, qui fait un crime au malade de son infirmité, et au médecin des soins qu'il lui prodigue. Sans doute, si cette femme se fût jetée à ses pieds, il l'aurait repoussée violemment avec dédain; il se fût imaginé que ce contact allait souiller son âme, parce qu'il n'était pas rempli de la véritable justice. C'est ainsi que quelques-uns de ceux qui exercent le ministère pastoral, dès qu'ils pratiquent quelques oeuvres médiocres de justice, regardent avec mépris ceux qui leur sont soumis, et affectent du dédain pour tous les pécheurs qu'ils rencontrent. Nous devons, au contraire, lorsque nous considérons l'état malheureux des pécheurs, déplorer dans leur calamité notre propre malheur, à la pensée que nous sommes déjà tombés, ou que nous pouvons tomber dans les mêmes fautes. Il faut d'ailleurs faire usage d'un grand discernement, nous devons être sévères pour les vices, pleins de compassion pour les personnes; si le pécheur doit être puni, le prochain a droit à notre charité. Je vais plus loin, et je dis que dès que le pécheur châtie lui-même par la pénitence le mal qu'il a fait, il cesse d'être pécheur, puisqu'il punit en lui-même ce que la justice divine condamne. Notre-Seigneur se trouvait donc entre deux malades, mais l'un, jusque dans sa fièvre, conservait l'usage de la raison, tandis que l'autre avait perdu l'esprit; la femme pécheresse pleurait les fautes qu'elle avait commises; le pharisien, au contraire, fier de sa fausse justice, exagérait la force de sa santé.


Source: Saint Grégoire le Grand (Peronne-Vivès 1868)