Lecture d'un commentaire (833)


Mc 12,13

Commentaire: Le piège est le suivant : les adversaires de Jésus lui posent des questions au sujet de l’impôt que les Juifs doivent payer à César, empereur de Rome. Car la Palestine a été colonisée par les Romains, et les Juifs se trouvent sous leur domination. Les Pharisiens et les partisans d’Hérode, ennemis en politique, s’allient. Les Pharisiens sont contre la domination de Rome, tandis que les partisans d’Hérode l’acceptent. Si Jésus dit qu’ils doivent payer, les Pharisiens le discréditeront auprès du peuple. S’il dit le contraire, les partisans d’Hérode auront un motif pour le faire arrêter par les Romains. Jésus ne condamne pas l’impérialisme romain, il ne le justifie pas non plus. Est-ce à dire que la paix et la justice entre les peuples sont étrangères aux “questions spirituelles” et n’intéressent pas Jésus ? Bien entendu, ces problèmes sont importants et l’histoire biblique nous révèle que Dieu désire pour chaque homme la liberté, et pour les nations la possibilité de développer culture et vie nationale : c’est cela qui justifie l’engagement politique des chrétiens. Mais Jésus sait aussi que la véritable libération de l’homme se joue bien au-delà des querelles et des rivalités partisanes. Or à son époque, le peuple juif est déchiré par la vie politique et divisé en factions irréconciliables qui seront une des causes de la destruction de la nation au cours de la grande révolte de 66-70 après J.-C. Jésus invite ses adversaires à remettre la vie politique à sa véritable place et à cesser de confondre foi et fanatisme religieux. Pour les Pharisiens, payer l’impôt à César, souverain étranger et païen, c’était renier Dieu, le seul Seigneur d’Israël. Ils identifiaient le parti national juif et la cause de Dieu et pour servir Dieu, il leur fallait écraser les partis adverses. Le César de Rome n’était pas Dieu, même s’il le prétendait. Il avait imposé son autorité et l’usage de la monnaie romaine, mais il ne pouvait exiger la soumission d’une conscience qui n’appartient qu’à Dieu. Il n’était pas non plus “l’ennemi de Dieu” comme le pensaient les Pharisiens, et pour servir le royaume de Dieu, il n’était pas nécessaire de refuser l’impôt ou l’obéissance civique à César. Par sa réponse “à César ce qui est de son domaine, à Dieu…” Jésus distingue la religion et la politique dans une culture où les hommes politiques cherchaient toujours une justification dans la religion et où, par le fait même, les adversaires politiques étaient regardés comme des ennemis de Dieu. Dans le récit de Marc, l’alliance des partisans d’Hérode et des pharisiens, comme en Marc 3.6 et Marc 8.15, autorise à penser que cette controverse date de la même période du ministère de Jésus en Galilée.


Source: Bible des peuples