Lecture d'un commentaire (782)


Mc 8,1

Commentaire: Ce second récit de la multiplication des pains n’est pas la répétition du premier. Il est évident que le seul fait d’avoir à transmettre oralement ces récits amenait fatalement à les couler dans un même moule, mais le sens est différent. La première fois, entre Tibériade et Capharnaüm (c’est-à-dire au centre de l’activité de Jésus en Galilée), la foule est venue à Jésus plus nombreuse et il leur a multiplié le pain, signe évident qu’il est le Messie annoncé par les prophètes. C’est alors que la foule veut l’acclamer comme son libérateur (Jean 6), et Jésus s’y refuse. Le lendemain, à son tour, Jésus les oblige à se prononcer à son sujet et la rupture se produit (Jean 6.60). Mais plus tard, Jésus se rend aux frontières de la Galilée où une grande partie de la population est païenne. Eux aussi veulent écouter Jésus et durant deux jours ils le suivent dans ce désert. Alors, sur l’autre rive, à l’est, il leur offre le pain comme repas d’adieux. Les deux multiplications des pains rapportées par Marc diffèrent en plusieurs points : le nombre des pains et des poissons, le nombre des participants, mais aussi le nombre de paniers (le panier rigide des Juifs) ou de corbeilles (le sac pliant des Grecs) qu’on emporte après le miracle. Le chiffre douze nous fait penser aux douze tribus d’Israël comme aux douze apôtres, par contre le chiffre sept rappelle les sept nations païennes qui occupaient le pays de Canaan, ainsi que les sept diacres de l’Église primitive. Ces divergences dans des chiffres significatifs soulignent la volonté de Marc, en rapportant ces deux miracles, de prendre en compte la réalité de l’Église au moment où il rédige son évangile : née en terre juive, elle comptait maintenant des communautés grecques. Et c’est ainsi qu’en Marc 6.41 Marc a mis : “prononce la bénédiction”, ce qui est le mot propre de l’Eucharistie en milieu juif, et en Marc 8.6 il écrit : “il rend grâces”, ce qui est le terme consacré dans les communautés grecques. Certains auteurs pensent qu’il s’agit d’un même événement qui aura été rapporté de façon différente dans des communautés d’origine juive et dans les communautés grecques avant qu’on en fasse deux événements distincts dans une rédaction finale de Marc. Mais la séquence qui contient les deux multiplications est très ancienne (voir commentaire de Matthieu 14.13) : elle n’est pas le fruit d’une époque tardive qui n’aurait plus eu de contact avec la réalité. Celle-ci est réaffirmée en Matthieu 16.5 et plus encore en Marc 8.19. La multiplication des pains tient, dans les évangiles une place importante, car elle fait apparaître Jésus comme le Messie : voir à ce sujet les commentaires de Matthieu 15.29, Luc 9.12 et Jean 6. - 8.10 Dalmanoutha : une localité aussi inconnue que Magadan que nous lisons en Matthieu 15.39.


Source: Bible des peuples