Lecture d'un commentaire (4873)


1Ch 1,1

Commentaire: Paroles des Jours, Dibréi haïamîm: tel est le vrai titre, apparemment fort ancien, d’une oeuvre que les Septante ont dénommée Paraleïpomena, « Omissions », et que Jérôme a définie comme une chronique de toute l’histoire divine: Chronicon totius historiae divinae. Comme Shemouél (Samuel) et Rois, les Paroles des Jours formaient à l’origine un seul volume. Ce sont les Septante qui ont introduit, ici comme ailleurs, la division en deux livres; et celle-ci s’est imposée ensuite, même dans la Bible hébraïque à partir du XVe siècle.
L’intention de l’auteur est de nous donner une histoire complète du royaume de Juda depuis David jusqu’au décret qui autorisa le retour des exilés. Mais ce récit est situé dans l’histoire générale des Hébreux, en la commençant par des généalogies qui la font remonter jusqu’à Adâm. Ces textes, présentés d’une façon relativement homogène, semblent provenir de sources très diverses, dans un souci constant de préserver de l’oubli d’antiques traditions.
Après cette sorte d’introduction, les deux parties s’équilibrent: le premier livre raconte l’histoire de David, tandis que le deuxième est consacré à celle de Salomon et de ses successeurs à la tête du royaume de Juda.
La tendance apologétique est certaine: il faut prouver, d’abord, que David a été un roi parfait, le véritable père d’Israël, sans faiblesse dans l’administration de son royaume comme dans son unification. L’auteur nous donne des renseignements inédits sur l’organisation du premier État d’Israël, sur la construction du Temple et sur son administration. David n’a pas seulement réuni les matériaux qui devaient servir à son édification: il a aussi organisé d’avance le culte qui devait s’y célébrer.
Le livre 2 fait le récit du règne de Salomon en reprenant presque en entier les chapitres 1 à 11 de 1 Rois; mais il omet tout ce qui pourrait amoindrir la figure de celui qui a bâti la maison d’Elohîms. Il passe ainsi sous silence les hauts lieux édifiés par le roi en l’honneur de divinités étrangères, à Jérusalem même et jusque dans le voisinage du Temple.
Ce même souci apologétique apparaît dans l’histoire des vingt descendants et successeurs de David et de Salomon. Ce qui, cependant, est particulièrement remarquable, c’est que dans l’ensemble de l’ouvrage toute la lumière se concentre sur le Temple. C’est lui qui, au premier chef, intéresse le Chroniste.
Selon une ancienne tradition juive, Esdras et Néhémie auraient été les auteurs de ce volume. La critique repousse aujourd’hui cette attribution. Elle s’appuie sur le fait de formes littéraires tardives et sur l’état des institutions telles que l’auteur les décrit pour fixer la composition de Paroles des Jours à la fin de la période perse, au IVe siècle avant l’ère chrétienne, sans qu’il soit possible de préciser davantage.
Même si l’oeuvre est relativement tardive, il apparaît avec évidence que son auteur a eu à sa disposition des documents beaucoup plus anciens; certains remontant au début de l’époque royale et même au-delà. Paroles des Jours nous livre ainsi les sources mêmes de la tradition hébraïque.


Source: Chouraqui