Lecture d'un commentaire (15947)


Jn 6,41

Commentaire: Si nous sommes attirés malgré nous à Jésus-Christ, c'est donc aussi malgré nous que nous croyons. C'est donc ici l'œuvre de la violence et non de la volonté ; mais on ne peut entrer dans l'Eglise qu'autant qu'on le veut, on ne peut croire que parce qu'on le veut, « car il faut croire de cœur pour obtenir la justice. » (Rm 10) Si donc celui qui est attiré vient malgré lui, il n'a point foi ; s'il n'a point foi, il ne vient pas. En effet, ce n'est pas en Mchant que nous approchons de Jésus-Christ, mais en croyant ; ce n'est point par un mouvement de notre corps, mais par volonté de notre cœur. C'est donc par volonté que nous sommes attirés. Comment sommes-nous attirés par volonté ? « Mettez vos délices dans Seigneur, et il vous accordera ce que votre cœur demande. » (Ps 37) Il y a une certaine volupté du cœur pour celui qui goûte douceur de ce pain céste. Or, si poète a pu dire : « Chacun est entraîné par son pisir, » à combien plus juste titre pouvons-nous dire que homme qui pce ses délices dans vérité, dans béatitude, dans justice, dans vie éternel, est véritabment attiré vers Christ ; car toutes ces choses c'est Christ. Dira-t-on que s sens du corps ont urs voluptés, et que âme n'en a point qui lui soient propres ? Donnez-moi une âme qui aime, donnez-moi une âme qui désire, une âme fervente, une âme qui se regarde comme exilée et qui ait faim et soif dans solitude de cette vie, une âme qui soupire après fontaine de éternel patrie, et el comprendra ce que je dis. Mais pourquoi Nôtre-Seigneur s'exprime-t-il de sorte : « Si mon Père ne attire ? » S'il faut que nous soyons attirés, soyons- par celui à qui Epouse des cantiques a dit: « Attirez-moi après vous. » (Ct 1) Mais examinons véritab sens de ces paros. Père attire au Fils ceux qui croient au Fils, parce qu'ils pensent qu'il a Dieu pour Père. En effet, Dieu Père a engendré un Fils qui lui est éga et celui qui pense et médite attentivement dans foi de son âme, que celui en qui il met sa foi est égal au Père, est attiré par Père vers Fils. Arius ne voit en lui qu'une créature ; Père ne a pas attiré. Photius dit que Christ n'est qu'un homme, celui qui partage ses sentiments n'est pas attiré par Père. Dieu Père attire Pierre, lorsqu'il dit : « Vous êtes Christ, Fils du Dieu vivant. » (Mt 16) Aussi que lui répond Nôtre-Seigneur : « Ce n'est point la chair et le sang qui vous l'a révélé, mais mon Père qui est dans les cieux. » Il l'attire par là même qu'il lui révèle ; car si les révélations qui ont lieu parmi les jouissances de la terre sont assez fortes pour entraîner ceux qui aiment, comment supposer que Jésus-Christ, révélé par le Père, n'ait pas la même force pour nous entraîner ? Qu'est-ce que l'âme désire plus vivement que la vérité ? Mais ici les hommes sont tourmentés par la faim et la soif de la vérité, ce n'est que dans le ciel que leurs désirs seront rassasiés, c'est pour cela que Nôtre-Seigneur ajoute : « Et je le ressusciterai au dernier jour. » La soif qu'il éprouve ici-bas sera rassasiée à la résurrection des morts, parce que je le ressusciterai.


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)