Lecture d'un commentaire (13930)


Lc 16,14

Commentaire: Il nous faut d'abord traiter de la loi du mariage, avant d'en venir à la prohibition du divorce. Il en est qui pensent que tout mariage a Dieu pour auteur, parce qu'il est écrit: «Que l'homme ne sépare point ce que Dieu a uni» ( Mt 19,6 Mc 10,9 ). Mais comment alors Apôtre a-t-il pu dire: «Si mari infidè se sépare d'avec sa femme, qu'el isse alr ?» ( 1Co 7,15 ). Ces paroles démontrent clairement que Dieu n'est pas l'auteur de tous les mariages; car ce n'est point conformément à sa volonté, que les chrétiens s'unissent aux Gentils. Gardez-vous donc de renvoyer votre épouse, pour ne pas désavouer que Dieu est l'auteur de votre union. Vous devez supporter les défauts de vos semblables, à plus forte raison devez-vous supporter et corriger les défauts de votre épouse. Si vous la renvoyez après qu'elle vous a donné des enfants, n'est-ce pas une cruauté que de renvoyer la mère, et de retenir les gages de votr e mutuelle union, et de la blesser ainsi dans son amour maternel, en même temps que dans son honneur? Mais ne serait-il pas plus cruel encore de chasser les enfants à cause de la mère? Souffrirez-vous que de votre vivant, vos enfants soient sous la dépendance d'un beau-père, ou que du vivant de leur mère ils soient assujettis à une marâtre? Quoi de plus dangereux que d'exposer aux séductions de l'erreur l'âge si fragile d'une jeune femme? Quoi de plus barbare, que d'abandonner dans sa vieillesse, celle qui a perdu auprès de vous les grâces de sa jeunesse? Supposez qu'ainsi répudiée, elle ne se marie pas, est-ce qu'il ne vous est pas désagréable qu'elle reste fidèle à un adultère? Admettez, au contraire, qu'elle contracte une autre union, la nécessité où elle se trouve fait votre crime, et ce que vous regardez comme un mariage, n'est qu'un adultère. Tel est le sens moral de ce passage. Cependant, comme Notre-Seigneur vient de dire précédemment que le royaume de Dieu était annoncé, et que le plus petit point de la loi ne serait point effacé, et qu'il ajoute ensuite: «Quiconque renvoie sa femme», etc.; on peut donner ici cette interprétation figurée: L'homme, c'est Jésus-Christ; l'épouse, c'est l'Église, épouse par la charité, vierge par la chasteté. Que celui donc que Dieu a par sa grâce attiré à son Fils, ne s'en laisse ni séparer par la persécution, ni détourner par les plaisirs des sens; qu'il ne se laisse point dépouiller par la philosophie, ni empoisonner par l'hérésie, ni entraîner par les Juifs. Tous ceux qui s'efforcent de corrompre la vérité de la foi et de la sagesse sont des adultères.


Source: Saint Ambroise (Peronne-Vivès 1868)