Lecture d'un commentaire (13175)


Lc 10,38

Commentaire: Marthe s'occupait avec raison de pourvoir aux nécessités corporelles, et aux désirs de la nature humaine du Seigneur; mais celui qu'elle voyait revêtu d'une chair mortelle, «dès le commencement était le Verbe».C'est ce Verbe que Marie écoutait. Ce Verbe s'est fait chair, c'est celui que Marthe servait. L'une travaillait, l'autre contemplait. Cependant Marthe, accablée de ce travail et de tout le soin du service, s'adresse au Seigneur, et se plaint de sa soeur: «Seigneur, souffrirez-vous que ma soeur me laisse servir seule ?» etc. Marie, en effet, était tout absorbée de la douceur de la parole du Seigneur, Marthe préparait un festin au Sauveur, qui lui-même servait alors à Marie un festin bien plus délicieux. Or, comment n'aurait-elle pas craint que le Seigneur pressé par sa soeur, vint à lui dire: «Levez-vous, et venez en aide à votre soeur», alors qu'elle goûtait avec suavité les douces paroles du Sauveur, et que son coeur était plongé tout entier dans cette divine nourriture? Elle était absorbée dans d'ineffables délices, bien supérieures à toutes les délices corporelles. Elle accepte donc ce reproche d'oisiveté, et confie sa cause à son juge, sans se mettre en peine de répondre, dans la crainte que le soin même de répondre ne vint à la distraire de l'attention qu'elle donne aux paroles du Seigneur. Le Seigneur répondit donc pour elle, lui pour qui la parole n'est pas un travail, parce qu'il est le Verbe: «Le Seigneur lui répondit: Marthe, Marthe, vous vous inquiétez», etc. Cette répétition du nom de Marthe, est un signe de l'affection du Sauveur pour elle, ou un moyen de la rendre plus attentive à la leçon qu'il va lui donner. Après l'avoir ainsi appelée deux fois, il lui dit: «Vous vous inquiétez de beaucoup de choses», c'est-à-dire vous êtes occupée de beaucoup de choses. En effet, quand l'homme se charge de servir, il veut suffire à tout, et il ne peut y réussir; il cherche ce qui lui manque, il prépare ce qu'il a sous la main, et son esprit est dans le trouble et l'agitation. Ainsi Marthe n'eût point demandé que sa soeur vînt l'aider, si elle avait pu seule suffire au travail. Elle s'inquiète de beaucoup de choses, ses inquiétudes, ses préoccupations sont nombreuses, elles sont de diverses sortes, parce qu'elles ont pour objet les c hoses de la terre et du temps. Or, à toutes ces choses, Notre-Seigneur en préfère une seule; car ce ne sont pas toutes ces choses qui en ont produit une seule, mais elles sont elles-mêmes sorties d'un seul principe. Aussi écoutez la parole du Sauveur: «Or, une seule chose est nécessaire». Marie a voulu n'être occupée que d'une seule chose, selon cette parole du Psalmiste: «Il est bon pour moi de m'attacher à Dieu» ( Ps 72). Père, Fils, Saint-Esprit, ne font qu'une seu et même chose; et nous ne pouvons parvenir à cette seu chose, qu'autant que nous avons tous un même coeur. ( Ac 4).


Source: Saint Augustin (Peronne-Vivès 1868)